Crise économique, corruption, Daech, religion

ce qu’en pensent les jeunes en Algérie



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La crise économique fait peur aux jeunes algériens. Selon le dernier rapport du PNUD sur le monde arabe, le plus important défi rencontré par les jeunes en Algérie est lié à la situation économique (pauvreté, chômage, hausse des prix), selon 76,9% des jeunes interrogés. En deuxième lieu, la corruption administrative et financière obtient 14,9% des réponses. Le renforcement de la démocratie ainsi que la stabilité et la sécurité internes semblent en comparaison secondaires, avec respectivement 2,7% et 3,3% des réponses.

La question économique est première à travers le monde arabe, sauf en Libye, où elle vient après la corruption financière et administrative. Par rapport au reste des pays arabes, c’est en Irak que la stabilité et la sécurité internes semblent être le plus importantes, avec 9,3% des réponses. Le Koweït semble être le plus préoccupé par un renforcement de la démocratie, avec 9,4% des répondants qui voient cela comme le premier défi des jeunes dans le pays.

« Péché originel des économies arabes »

Le rapport sur le développement humain dans le monde arabe publié par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), publié mercredi 29 novembre, souligne la prédominance du secteur public dans l’économie, l’État étant vu comme un fournisseur de premier et dernier recours, ce que le PNUD appelle « l’échec du modèle de développement arabe ». L’appui sur des revenus non gagnés est qualifié de « péché originel des économies arabes ».

En Algérie, le pourcentage d’emplois dans le secteur public dépasse les 30%, contre environ 20% au Qatar et un peu moins de 15% au Maroc. Les stratégies d’emploi à l’échelle de la Nation s’appuient trop lourdement sur des politiques liées au marché du travail  « actif », ce qui fonctionne sur le court terme mais ne favorise pas la création d’emploi et la réforme de l’éducation, selon le PNUD.

Près de 40% des jeunes algériens s’attendaient en 2012 à ce que l’économie et la sécurité empirent. Les résultats étaient voisins au Maroc, mais plus faibles en Tunisie.

Immigration : les Marocains plus nombreux que les Algériens

Le rapport note que 3,5% de la population du pays a émigré entre 2010 et 2014 (la proportion des immigrants en Algérie étant de 0,4%). Au Maroc, le pourcentage d’émigrants est de 7,8%, et en Tunisie, il est de 5,2%. La destination privilégiée est l’Europe : 1.284.000 Algériens ont migré vers l’Europe entre 2010 et 2014, 51.000 vers l’Amérique du Nord, 11.200 vers des pays arabes et 23.000 vers d’autres destinations. Du côté des voisins de l’Algérie, 2.320.000 migrants marocains et 414.000 migrants tunisiens se sont rendus en Europe sur la même période.

Les jeunes migrants algériens de moins de 29 ans ayant fait des études ont tendance à s’installer en Amérique du Nord, alors que les migrants algériens qui se rendent en Europe ont tendance à être des travailleurs de plus de 30 ans.

Selon le PNUD, la mobilité au sein du monde arabe devrait être encouragée, plutôt que la migration permanente à l’extérieur de la région. Encourager la mobilité, à travers des équivalences de diplômes et d’acquis professionnels, pourrait en effet donner lieu à une création d’emplois.

Importance de la religion

Par ailleurs, le rapport  souligne le fait que la tolérance sociale des Algériens est la plus importante chez les personnes de 30 à 44 ans, à la différence de la Tunisie où ce sont les plus jeunes qui manifestent le plus de tolérance sociale.

La question de l’importance de la religion dans la vie des jeunes en Algérie obtenait 92% de « oui » en 2012. À travers le monde arabe, le « oui » à cette question obtient le plus souvent plus de 90%. Le rapport souligne toutefois les importantes divisions à travers le pays entre groupes qui prennent à cœur les questions politiques et religieuses mais ont à ces sujets des opinions différentes.

Plus de 11.000 attaques terroristes depuis 1970

Sur l’ensemble du monde arabe, l’Algérie a subi 12% des attaques terroristes entre 1970 et 2014, soit 11.061 attaques. Cela place le pays au deuxième rang, le pays le plus touché par le terrorisme sur cette période étant l’Irak (56% des attaques, soit 49.760 attaques). En troisième, la Syrie a subi 7% des attaques terroristes.

Le rapport déplore le fait que la prise en charge de la santé mentale soit insuffisante à travers le monde arabe et souligne l’importance de cette prise en charge, malgré les possibilités qu’offre la résilience, compte tenu des dommages que peuvent faire les problèmes psychologiques sur la collectivité, en particulier dans des contextes de conflit comme l’Algérie des années 1990.

Les jeunes algériens et Daech

En 2015, environ 84% des jeunes algériens étaient défavorables à Daech (environ 8% ne se prononçant pas, et environ 4% y étant favorables). Les pays arabes les plus défavorables à l’organisation sont le Liban, l’Irak et la Jordanie. Le moins défavorable est la Mauritanie, avec environ 75% de réponses négatives.

Selon le rapport, l’engagement civique est le plus important dans les pays où les médias ont la plus grande pénétration, comme l’Algérie, L’Irak, le Liban, la Palestine et le Yémen. L’engagement est plus faible en Égypte, en Jordanie, au Maroc et au Qatar.

Pour ce qui est du droit des femmes, le rapport met en avant le fait que l’Algérie soit devenue le premier pays du monde arabe à dépasser de 30% l’objectif de représentation des femmes au Parlement. Mais le PNUD rappelle que la représentation parlementaire n’est pas synonyme d’une amélioration de la situation politique ni du droit des femmes en général. L’introduction de quotas peut en effet donner lieu au népotisme, tandis que persistent les discriminations à l’égard des femmes politiques.

Le PNUD souligne l’existence de projets de loi contre la violence faite aux femmes en Algérie, au Maroc et en Tunisie, mais rappelle que ces lois souvent ne sont pas près d’entrer en vigueur, et encore moins d’être appliquées.

Les jeunes de 15 à 29 ans forment 30% de la population du monde arabe et pourraient devenir une ressource clé pour le développement économique et social de la région, selon le rapport.

Le PNUD appelle à la mise en place d’un nouveau modèle de développement qui se concentre sur l’amélioration des opportunités offertes aux jeunes, et rappelle qu’une jeunesse privée d’opportunités fait courir au pays un risque d’instabilité, citant comme exemple les révolutions qui ont traversé le monde arabe au cours de l’année 2011.


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