Le retour au protectionnisme du président Américain Ronald Trump, est-il réalisable ?



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Pour le président chinois, Xi Jinping, lors du Forum économique mondial de Davos, s’adressant au nouveau président américain Donald Trump, le 17 janvier 2017 personne n’émergera en vainqueur d’une guerre commerciale, je le cite :.. «cela ne sert à rien de blâmer la mondialisation. Toute tentative de stopper les échanges de capitaux, technologies et produits entre pays est impossible et à rebours de l’histoire. Nous devons rester attachés au développement du libre-échange et des investissements [transnationaux], et dire non au protectionnisme. Il faut « rééquilibrer » la mondialisation, et la rendre plus forte, plus inclusive, plus durable..». Dans ce contexte, il est utile de rappeler les fondamentaux de la crise de 1929 et celle de 2008. I.-La crise de 1929
Le krach de 1929 est consécutif à une bulle spéculative, dont la genèse remonte à 1927. La bulle fut amplifiée par le nouveau système d'achat à crédit d'actions, les investisseurs pouvant acheter des titres avec une couverture de seulement 10 %. Le taux d'emprunt dépend du taux d'intérêt à court terme ; la pérennité de ce système dépendant donc de la différence entre le taux d'appréciation des actions et ce taux d'emprunt. C’est le 24 octobre 1929 que la fameuse crise se déclencha aux Etats-Unis ; on appela ce jour le « jeudi noir » ou Black Thursday ? le krach boursier de Wall street plongeant l’économie américaine et l’économie mondiale, dans la tourmente et ce malgré l’apparente santé de l’économie américaine dont les bases de sa croissance étaient pourtant faibles. A la mi-octobre 1929 l’annonce de la baisse des bénéfices des industries poussa les spéculateurs à vendre leurs actions pendant que le cours de Wall Street était encore élevé. Cette vente entraîna une chute encore plus rapide des actions, plus de 16 millions de titres seront bradés sur le marché, sans trouver toutefois preneur. Les épargnants paniquent et se précipitent auprès de leur banque pour retirer leur argent. Bientôt des centaines de milliers d’actionnaires se trouvèrent ruinés ; les banques ne purent se faire rembourser leurs crédits et les épargnants retirèrent leur argent de leurs comptes. Un grand nombre de banques n’ayant pas les moyens de rembourser, leurs clients firent faillites. Pour s’en sortir le seul moyen des banques furent de stopper les prêts à l’étranger et de réclamer le remboursement de ceux déjà effectués.  De plus les capitaux américains cessèrent de circuler autour de la planète, la conséquence inévitable fut l’expansion de la crise à l’ensemble des pays industrialisés. Entre le 22 octobre et le 13 novembre 2009, l'indice Dow Jones passe de 326,51 à 198,69 (39 %), ce qui correspond à une perte virtuelle de 30 milliards de dollars, dix fois le budget de l'État fédéral américain de cette époque. Par un effet de dominos, c'est l'ensemble de la Bourse qui s'effondre, et la chute de 1930 à 1932 est supérieure à celle de l'année 1929. Le 8 juillet 1932, le Dow Jones tombe à 41,22, son plus bas niveau depuis sa création en 1896. La baisse des prix fut générale et atteint environ 30% de1929 à 1932. Suite à la hausse des taux d'intérêt en avril 1929, lorsque survient la première stagnation des cours, le remboursement des intérêts devient supérieur aux gains boursiers et l'économie réelle montre des signes de faiblesses : ainsi, la production automobile chute de 622 000 véhicules à 416 000 entre mars et septembre et la production industrielle recule de 7 % entre mai et octobre. Ce ralentissement est en partie dû à un phénomène d'asphyxie : les capitaux disponibles accourent à la bourse plutôt que vers l'économie « réelle » La perte de confiance due à la crise boursière affecte la consommation et les investissements lors des mois suivant le krach. Les crédits se tarissant, la consommation, l'investissement et la production continuent de chuter, le chômage explose (de 1,5 million à 15 millions en 1933), et la crise bancaire devient une crise économique en 1931. Les mesures protectionnistes telles que la loi Hawley-Smoot de 1930 sur les droits de douane, favorisent la propagation de la crise à toutes les économies occidentales à partir de 1931. Début 1933 les profondes crises sociales et économiques favorisèrent les interventions publiques et la naissance de différents fascismes européens. Début 1933 la crise était au plus haut aux Etats-Unis, le nouveau président, fraîchement élu, Franklin D. Roosevelt, lança le New Deal (intervention accrue de l’Etat, infrastructure pour lutter contre le chômage, assainissement des finances). La dépression recula un peu, mais c’est surtout l’entrée en guerre des Etats-Unis grâce aux commandes dépenses militaires qui la fit disparaître en 1941. En Allemagne et en France on adopta aussi les théories de Keynes qui sont des politiques conjoncturelles, et non structurelles, de la relance de la demande globale: les dépenses publiques devant  compenser le manque d’investissements privés. En 1934 le gouvernement de Laval décida le blocage du salaire des fonctionnaires ; les résultats économiques furent infimes et l’agitation sociale s’en trouva renforcée. L’extrême droite française s’était aussi renforcée, mais le Front Populaire face à cette crise remporta les élections en 1936. En Allemagne la situation ne se stabilisa pas vraiment la crise ayant  permis à deux hommes populistes  de parvenir au pouvoir : Adolf Hitler en Allemagne et en  Italie,  Mussolini ce qui provoqua la seconde guerre mondiale.

II.- La crise d’octobre 2008
Il existe bon nombre de similitudes entre la crise d’octobre 1929 et celle d’octobre 2008 : boom économique précédent la crise, endettement croissant et divorce entre la sphère réelle et financière, répercussion sur la sphère réelle avec la chute des valeurs technologiques. Mais à la différence de 1929 existe une interconnexion plus importante des économies avec une plus forte régulation mondiale. Par ailleurs, les économies des pays développées sont  en déflation (faible inflation, chômage croissance négative) et non en stagflation (inflation et chômage décroissance). Comme en témoigne la socialisation des pertes de certaines banques la rapidité des interventions des banques centrales que ce soit la FED américaine ,la banque centrale européenne, la banque d’Angleterre, japonaise, russe, et même chinoise et indienne de coordination pour briser le cercle vicieux du manque de confiance, prêts interbancaires bloqués qui constitue l’élément vital de fonctionnement de l’économie mondiale. Tout système économique et financier fiable repose sur la confiance. Avec les banqueroutes répétées, le crédit interbancaire source de l’expansion de l’économie mondiale a eu tendance à s’assécher surtout au niveau des banques d’affaires qui ont connu une expansion inégalée durant la période contemporaine. Or, à la différence d'une banque universelle, une banque d'affaires n'a pas la possibilité, en cas de conditions de marché difficiles, de s'appuyer sur les dépôts des particuliers pour lever des fonds pour le court terme, bien qu’elles continuent à émettre des dettes à court terme pour financer leur activité. Or, de plus en plus les établissements financiers auprès desquels les banques d'affaires se refinançaient refusent en période de crise de prêter par manque de confiance dans la capacité de remboursement de ces banques. D’une manière générale, l’essence de la crise tant de 1929 que de 2008 sont une dénaturation du fondement du capitalisme telle que l’on décrit les fondateurs de l’économie politique reposant sur les entreprenants créateurs de richesses, Karl Marx n’ayant pas écrit le socialisme mais le Capital.  Cette crise est donc lié à la financiarisation accrue en déconnection avec la sphère réelle et la non symbiose de la dynamique économique et de la dynamique sociale oubliant que le travail est certes un prix mais créateur de valeur et vecteur de croissance. En effet, avec cette financiarisation croissante, nous avons deux types de détention d’actions. La détention directe (ceux qui les détiennent en propres) et la détention indirecte (ceux qui les détiennent par le biais d’un intermédiaire : organismes de gestion, sociétés d’assurances-vie, caisses de retraite, SICAV). Le fait nouveau réside dans la modification rapide et importante du type d’actions détenues par les ménages. La détention directe d’actions devient minoritaire, pendant que la détention indirecte s’est fort développée. Ce sont aujourd’hui les fonds de pension qui contrôle Wall Street gérant plus  du tiers de la capitalisation boursière des USA. Ces dysfonctionnements ont été concrétisées à travers la crise des prêts hypothécaires (subprimes ) en août 2007, crise qui s’est propagée à l’ensemble des bourses mondiales avec des pertes estimées à plusieurs centaines de milliards de dollars que je résume en cinq étapes :
1- les banques ont fait des prêts immobiliers à des ménages insolvables ou présentant peu de garanties, à des taux d’intérêts élevés ;  
2- diffusion des mauvaises créances dans le marché : pour évacuer les risques, les banques «titrisent» leurs créances, c’est-à-dire qu’elles découpent leur dette en produits financiers pour la revendre sur le marché. La mondialisation a fait le reste, en diffusant ces titres à risque dans les portefeuilles d’investisseurs de toute la planète. Les fonds spéculatifs (hedge funds) ont été de gros acheteurs de subprimes, souvent à crédit pour doper leurs rendements (jusqu’à 30 % par an), et faire jouer l’effet de levier, les hedge funds empruntant jusqu’à 90 % des sommes nécessaires;  
3- retournement du marché immobilier américain : vers fin 2005, les taux d’intérêts américains ont commencé à remonter alors que le marché financier s’essoufflait. Des milliers de ménages ont été incapables d’honorer leurs remboursements entraînant des pertes pour les banques et les investisseurs qui ont achetés les titres obligataires ont vu leur valeur s’effondrer
4- crise de confiance : les banques se sont retrouvées dans une situation ou comme dans un jeu de poker , elles savent ce qu’elles ont dans leur bilan , mais pas ce qui se trouve dans celui des autres car ces mauvais crédits immobiliers ont été achetés un peu partout dans le monde et on ne sait quelle est la répartition du risque d’où une grave crise de confiance et depuis juillet 2007, cette situation fait chuter les bourses et paralyse le marché inter -bancaire , les banques ne se prêtant plus ou très peu craignant que leurs homologues soient dans une ligne rouge ; 5- intervention des banques centrales : face à la paralysie du marché , les banque centrales sont intervenues massivement début août 2007 en injectant plusieurs centaines de milliards de dollars et d’euros de liquidités.

III - Rappel de la réunion de  crise du  G20 -15 novembre 2008- à Washington (USA)
Elle s'est articulée autour de  cinq objectifs dont  le renforcement du système de la régulation mondiale, qui ne saurait signifier le protectionnisme. Premièrement, de dégager une réponse commune à la crise financière-deuxièmement, ouvrir les pistes d'une réforme en profondeur du système financier international –troisièmement, prendre de nouvelles initiatives pour parer à d'éventuelles faillites bancaires et imposer aux banques de nouvelles normes comptables –quatrièmement, des règles plus strictes sur les agences de notation, la titrisation et les parachutes dorés – cinquièmement, accroître les dépenses publiques à travers des déficits budgétaires coordonnées, mais au profit du secteur privé,  des économies d’énergies pour le  BTPH et des technologies propres pour le secteur automobile, remettant d’ailleurs en cause au pacte de stabilité européen (3% du PIB et dépenses publiques sur /PIB moins de 60%.  Mais force est de constater qu’en ce mois de janvier 2017, l’économie mondiale est toujours caractérisée par des turbulences avec des options protectionnistes mais dans un cadre de libéralisation interne effrénée voulant remettre  en vogue la main invisible du marché d’Adam Smith, ce qui risque de  réitérer  le scénario des années 1929/1930.  Or,  l’objectif stratégique est de repenser l’actuel système économique mondial qui favorise la bipolarisation Nord/Sud, la pauvreté préjudiciable à l’avenir de l’humanité, accéléré d’ailleurs par les gouvernances les plus discutables de la part de la plupart des dirigeants du Sud. En bref, le retour au protectionnisme mondial est une chimère et le réalisme l’emportera : méditons   la crise d’octobre 1929  et celle d’octobre 2008. D’ailleurs l’important déficit de la balance des paiements américaine, qui sera accentué avec le nouveau programme des dépenses publiques annoncées par le nouveau président, (avec le risque d’une perte de valeur  de  la cotation du dollar et sur  le  cours du pétrole traditionnel), est contrebalancé actuellement par les importants flux de capitaux en provenance de l’extérieur.  Evitons pour le bien être de l’humanité,  le nationalisme chauvinisme source de tensions, de haine et de guerre avec des  incidences négatives sur les économies des pays en voie de développement et méditons cette citation  que l’on impute tantôt  au  président français Charles de Gaulle, sous le titre  « le patriotisme, c'est aimer son pays. Le nationalisme, c'est détester celui des autres » et tantôt à Romain Garyn dans son ouvrage « éducation européenne » publié en 1945 sous le titre  « le patriotisme c'est l'amour des siens. Le nationalisme c'est la haine des autres ».  De 2009 à 2016 un  nouveau paradigme : l’on est passé de la crise bancaire à une crise d’endettement des Etats. Pour l’Algérie, le retour au protectionnisme aurait un effet désastreux, une économie  mono-exportatrice, dépendante des fluctuations mondiales.

 


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