Acquis et renoncements politiques



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Soixante et un ans après sa création en pleine Guerre de Libération nationale, le 24 Février 1956, l’UGTA peine à opérer les mutations qu’imposent les exigences du pluralisme démocratique et à être à l’écoute des aspirations des travailleurs. La nationalisation des hydrocarbures en 1971 est intervenue comme une mesure révolutionnaire achevant  l’œuvre de recouvrement de la souveraineté nationale. Mais 46 ans après, le pays reste dangereusement dépendant de ses ressources fossiles. Soixante et un ans après sa création, et vingt sept ans après sa «libération» du parti unique, le FLN, l’Union générale des travailleurs algériens (Ugta) se retrouve tantôt sévèrement critiquée pour ses positions proches du pouvoir, tantôt décriée avec virulence pour son silence face à des situations de violation des droits syndicaux, tantôt dénoncée pour son hégémonie sur la classe ouvrière. Selon un de ses anciens dirigeants, Abdelmadjid Azzi, «il n’existe plus du moment où son secrétaire général a déclaré, publiquement, que l’organisation fait partie du gouvernement. Non seulement c’est scandaleux, mais c’est une violation des statuts de l’UGTA. Ces statuts sont clairs et n’ont pas été changés. Ceux-ci stipulent que l’UGTA est une organisation des travailleurs qui n’a de relation ni avec les partis politiques ni avec le gouvernement». L’avis peut ne pas être partagé. Cependant, beaucoup d’anciens cadres de la centrale syndicale n’en pensent pas moins. L’Union est réduite au rôle de pompier, prête à étouffer dans l’œuf toute contestation sociale. Les plus téméraires de ses sections les plus sensibles, comme celles de la zone industrielle, de la  poste ou encore du transport aérien, ou de l’industrie métallique, agissent souvent en électrons libres, faisant fi des directives de la centrale, plus prompte à réagir lorsqu’il s’agit de grève, que quand il faut mettre en conformité des unions de wilaya dont les mandats ont expiré depuis des lustres. L’arrivée des syndicats autonomes sur le terrain de la contestation sociale a privé l’Union d’un bon nombre de ses cadres syndicaux et d’adhérents à la recherche d’une plus grande liberté d’action et de revendication, même si sur le terrain, le champ d’activité est limité pour devenir un contre-pouvoir ou une force sociale. Le premier responsable de la centrale, Abdelmadjid Sidi Saïd, n’adhère pas à cet avis. Il préfère «être pragmatique» en exhibant un bilan chiffré de 171 pages de l’organisation qu’il dirige depuis février 1997 (après l’assassinat, le 28 janvier 1997, de son prédécesseur Abdelhak Benhamouda). Il ne veut pas répondre à ses «détracteurs» et se limite à mettre en avant «les acquis sociaux» que l’Ugta «a réussi à arracher depuis 1990». En 171 pages, le document retrace par des chiffres et des graphes, «le parcours syndical et sociétal» de l’organisation jusqu’au mois de février en cours, d’abord, en termes d’adhésion à l’organisation «qui rassemble toutes les sensibilités politiques» et qui compte «actuellement 2 567 600 adhérents, dont 300 200 retraités et 257 261 travailleuses». Malgré l’avancée des syndicats autonomes, l’effectif de l’Union a connu une progression «assez remarquable de 16% en passant de 2 156 219 adhérents en 2015 à 2 567 600 en 2016». L’Ugta compte, dans ses structures, quelque 900 448 élus et fait partie de plusieurs organisations et institutions internationales, arabes et régionales. Entre 1990 et 1999, «elle a arraché de nombreux accords dans le secteur économique et privé ayant permis une augmentation salariale de 42% pour quelque 2 213 000 salariés». Mieux encore, ajoute le responsable, entre 2000 et 2016, les salaires des 3 212 088 travailleurs du secteur économique (privé et public) ont connu une hausse de 54% et ceux des 3 103 410 employés de la Fonction publique ont atteint une hausse de 66%. Il rappelle les résultats de la tripartite de 2006, qui a consolidé la création du Fonds national des réserves de la retraite (Fnrr) alimenté par 2% de la fiscalité pétrolière, revue à 3% en 2012, mais aussi les augmentations obtenues par les retraités, qui ont atteint 48% entre 2000 et 2016, après avoir connu une revalorisation de 20% durant les années 1984 et 1999. Il en est de même pour le Salaire national minimum garanti (Snmg), qui a connu une hausse de 300% entre 2000 et 2014, en passant de 6000 DA à 18 000 DA, alors que dans le domaine de la Fonction publique, les bipartites (UGTA-gouvernement) ont permis la réforme du statut de la Fonction publique qui a suscité la promulgation de 60 statuts particuliers et 60 régimes indemnitaires en faveur des fonctionnaires. Toutes ces réalisations, précise le patron de l’Ugta, «mettent l’organisation en situation de partenaire social incontournable. Elle a acquis une prééminence que justifient à la fois sa réelle représentativité dans le monde du travail et le caractère réaliste et constructif de ses propositions. Tout au long de ces dernières années, elle a réussi à préserver les droits des travailleurs dans les domaines des salaires, de la garantie des emplois au sein des entreprises grâce à des négociations bipartites ou tripartites au niveau national, sectoriel ou des entreprises». Il rejette catégoriquement «toute idée d’exclusion» des syndicats autonomes. Pour lui, la place de l’Ugta est consacrée par l’article 36 de la loi 90-14, qui stipule «sont considérées représentatives à l’échelle communale, intercommunale, wilayale, inter-wilayale ou nationale, les unions, fédérations ou confédérations de travailleurs salariés regroupant au moins 20% des organisations syndicales représentatives couvertes par les statuts desdites unions, fédérations ou confédérations dans la circonscription territoriale concernée». Le ratio de représentativité de l’Ugta est de 40%, soit le double de ce qu’exige la loi. Ce qui n’est pas le cas pour les autres syndicats qui sont plus sectoriels. «Cela ne nous a pas empêché d’être à l’origine du dialogue social avec les syndicats autonomes au début de cette année», dit-il. Ce dialogue avait permis, faut-il le rappeler, la tenue d’une réunion qualifiée d’«historique» entre le secrétaire général de l’Ugta, le ministre du Travail et des représentants d’une vingtaine de syndicats autonomes autour d’un débat consacré au «dialogue social dans le monde du travail». Entre un bilan «positif en actions concrètes» et les critiques dirigées contre la gestion de la centrale syndicale, il y a un fait que même les syndicats autonomes reconnaissent : celui de la représentativité de l’Ugta, même si celle-ci reste plus liée aux alliances politiques de l’organisation, qui font d’elle un tremplin pour une ascension sociale ou politique, que liée à la conviction et à l’engagement militant. Soixante et un an après sa création dans la douleur pour accompagner la lutte armée pour l’indépendance et vingt sept ans après sa «libération» du parti unique et du statut d’organisation de masse, l’Ugta ne constitue pas une force sociale, encore moins un contre-pouvoir, malgré son armée d’adhérents à ses structures. Elle demeure toujours au service du pouvoir…  


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