Treize harraga portés disparus depuis janvier



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Aucune nouvelle depuis qu'ils ont quitté le Quai de Cristel en plein centre d'Oran le 8 janvier dernier. Treize harragas algériens, âgés entre 20 et 30 ans, sont portés disparus malgré les multiples tentatives de leurs familles pour les retrouver.

Ils ont frappé à toutes les portes, saisis le Ministère des Affaires Etrangères (AE) algérien, le Consul algérien d'Oujda, la Guardia espagnole et le Croissant rouge espagnol. Les connaisseurs de la « harga » pointent du doigt les garde-côtes marocaine de les avoir intercepté puis emprisonnés…L'un des parents continuent toujours à appeler son fils. « Le téléphone sonne toujours « , dit-il.

Ces harraga ont pris la mer à bord d'une embarcation baptisée le « bouté « dans le jargon de la « harga « équipée d'un moteur Yamaha de 60 chevaux vers la ville côtière espagnole Almeria.

Avec un passeur à bord de l'embarcation, les clandestins se sont lancés dans une aventure à haut risque, munis de leurs téléphones mobiles mais préférant laisser leurs pièces d'identités en Algérie. Les treize candidats à l'émigration clandestine ont embarqué exactement à 00H45, le 8 janvier dernier du quai de Cristel, une localité côtière en plein ville d'Oran, a affirmé au Jeune Indépendant Benkrelah Noureddine.

« Ils ont pu déjouer la vigilance de nos garde-côtes, et braver les risques pénales « , a-t-il dit. Leur destination était les plages d'Almeria, dans le sud de l'Espagne. Mais après deux heures de mer, les choses se sont compliquées pour les treize aventuriers, car un vaste brouillard s'est installé sur la mer selon l'un des clandestins qui a contacté un de ses amis qui a précisé à son interlocuteur qu'ils venaient alors de de laisser derrière eux les Iles Habibas, un territoire algérien situé au Nord-Ouest d'Oran.

L'un d'eux, Benoudda Abbés, a eu le réflexe d'appeler ses parents pour leur annoncer la mauvaise nouvelle. Ce harrag originaire quartier « petit jour « d'Oran a expliqué à sa famille qu'il se trouvait avec ses compagnons de fortune au large des iles Habibas avant que la discussion téléphonique ne soit interrompue.

« C'était le dernier appel de mon fils. J'ai beau essayé de le joindre à plusieurs reprises, en vain. J'ai beaucoup de doute sur le sort de mon fils, j'ai peur pour lui. S'il était mort on aurait repêché son corps. S'il était arrêté par la Guarda espagnole on l'aurait su. D'ailleurs, en parlant de la Guarda civile, on l'a sollicité pour savoir si elle possède le nom de mon fils et celui des autres sur sa liste des immigrants clandestins arrêtés.

Cette dernière nous a répondu qu'aucun immigrant n'est arrivé sur les côtes espagnoles le 8 janvier « . Le passeur chargé de les embarquer vers la destination de leurs rêves n'avait qu'une boussole comme moyen de navigation face à l'épaisseur du brouillard. Des, lors, la seule piste qui restait pour les parents c'est le Maroc. D'ailleurs, de nombreux harraga algériens ont dérivé vers les eaux territoriales marocaines.

Chaque année, des organisations internationales des droits de l'homme, des réfugiés et même celles de l'immigration clandestine condamnent et accusent le Royaume chérifien d'expulser sans raison des milliers d'immigrants clandestins, sans parler du traitement inhumain dans les prisons marocaines réservées à la détention des immigrants clandestins. Pour les familles des treize harraga algériens, la crainte est grande en raison de la conjoncture sécuritaire qui plane sur le monde.

Des démarches mais aucune réaction

Face à cette situation angoissante, les familles des jeunes harraga se sont organisées. Après plusieurs jours d'espoir et d'attente d'une réapparition de leurs chers ou d'une réaction, d'une information, les parents ont décidé d'agir.

Le 7 mars dernier, une lettre a été adressée par les familles des treize Algériens au Consul algérien d'Oujda, pour lui demander de l'aide. « On avait un grand espoir de cette lettre mais en vain c'était vraiment le contraire.

Pour nous cette lettre est désormais morte, sauf si quelqu'un daigne nous faire signe » dira M. Benekrelah, l'un des parents au Jeune Indépendant.

Deux jours après cette lettre, soit le 9 mars dernier, une autre lettre a été envoyée par les familles, cette fois c'est pour le Ministère des Affaires Etrangères, chargé de sécuriser et d'aider les compatriotes algériens se trouvant à l'étranger. Depuis, aucun signe de vie n'a été fait par le chargé du Ministère des AE ni celui du consul algérien d'Oujda. Un silence de trop qui ne fait qu'accentuer la crainte, le doute, le désespoir.

« L'attente est la plus pénible des souffrances « , dira notre interlocuteur qui ajoute que la « disparition de son fils Zakaria sa mère cadavérique tant elle a perdu gout à la nourriture, à la vie tout court, en raison de son immense chagrin ».

Ne baissant pas les bras tout en gardant le grand espoir de revoir leurs progénitures, les familles ont contacté la Croix-rouge espagnole (IFRC). Fort heureusement, aucun nom des treize jeunes algériens ne figurait sur la liste des immigrants clandestins (entre morts et vivants) que possède la Croix-rouge espagnole.

Aujourd'hui, les familles plaident les autorités algériennes à agir et à venir en leurs aides afin de retrouver leurs fils, vifs ou morts, mais « vifs Inchallah « disaient les familles. Toutefois, leur grand espoir reste les autorités algériennes afin qu'ils s'assurent tout d'abord que les 13 aventuriers ne sont pas tombés entre les mains des autorités marocaines. « Ils se sont certainement débarrassés de leurs documents personnels. Sans pièces d'identité, les marocains, les considèreront en tant qu'apatrides « , dira M. Benekrelah.

L'entreprise « Harraga », le ticket vers l'inconnu

Rien ne semble décourager l'entreprise Harraga, plus de 1 000 candidats à l'émigration clandestine vers l'Europe ont été interceptés ces deux dernières années aux larges d'Annaba, d'Aïn Témouchent, d'Oran, d'El Tarf et de Mostaganem.

En parlant des côtes oranaises, ces dernières sont connues pour être le lieu le plus prisé par les harraga. On se souvient du certain 24 septembre 2015, lorsque 17 jeunes candidats à l'émigration clandestine ont été sauvés in extremis d'une mort certaine grâce au numéro vert « 10 55 ».

En effet, le groupement territorial de la Gendarmerie nationale d'Oran a été contacté sur le numéro vert 10-55 par un candidat à l'émigration illégale, avisant qu'un groupe de jeunes se trouvait en difficulté à bord d'une embarcation pneumatique au large de la plage cap Carbon, commune d'Arzew.

Alertés, les garde-côtes d'Oran se sont dirigés vers ladite zone où ils ont secouru dix-sept personnes originaires d'Oran et de Mascara, qui s'apprêtaient à gagner clandestinement les côtes espagnoles à bord d'une embarcation.

En 2016, cette fois dans la wilaya d'El Tarf, les gendarmes de la Section de sécurité et d'intervention (SSI) ont déjoué un plan de 12 candidats à l'émigration clandestine qui se sont procuré un appareil de navigation par satellite (GPS) et 600 euros ainsi qu'un sabre.

L'avortement de cette tentative d'émigration clandestine a été l'œuvre des gendarmes sur la base de renseignements faisant état de la présence de plusieurs candidats à l'émigration clandestine dans la commune de Berrihane. Pourquoi les jeunes Algériens sont-ils tentés par l'émigration clandestine malgré les dangers ?
Quelles sont les raisons qui poussent les Harragas à risquer leur vie pour une « meilleure vie » ?

L'obstination de ces jeunes à vouloir quitter le pays et ce, en bravant tous les dangers, est aux yeux de beaucoup suicidaire. saute aux yeux que le harraga convoque un imaginaire de la mort. On lui prête des velléités de suicide alors que lui-même déclare vouloir aller tenter une expérience de vie ailleurs.

Ceux qui le tiennent pour un suicidaire ne se rendent pas compte de leur propre désarroi puisqu'ils n'ont de cesse de mettre l'accent sur le caractère dangereux, voire « mortel » de l'aventure dans laquelle ils voient le futur suicidant s'embarquer alors qu'en même temps ils veulent le sensibiliser sur la mort, derrière laquelle paradoxalement, il ne cesse en fait de courir. D'ailleurs, le harraga fait l'éloge de la « mort marine » qu'il préfère à la « mort terrestre ».

(Yakoulni el hout, ouma yakoulnich doud) littéralement « il vaut mieux être mangé par les poissons que par les asticots « .
Pour autant, le harraga veut réellement rejoindre l'autre berge, il fait tout pour échapper à la mort. Il mesure ses chances de succès. Il préfère faire son escapade surtout par beau temps, et se renseigne sur le profil du passeur. Mais chez lui, il y a toujours ce goût du risque, cette aspiration à se frôler à l'anéantissement de la mort..
Les télévisons satellitaires, le cinéma, la pub, le sport, ont fait de ce thème leurs choux gras.

N'empêche, le harraga va même jusqu'à choisir sur le plan imaginaire sa propre mort. Mais souvent quand ils dérivent, sont en détresse ou tombent en panne de moteur en plein mer , les harragas sont heureux de se voir sauver par des bateaux de passage, de recevoir une couverture sur le pont du navire et d'un sandwich.


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