La disponibilité et la fiabilité des chiffres en question



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Les statistiques sont toujours objet de controverse. Dans de nombreux cas, les chiffes se contredisent d’une source à l’autre au sein même du gouvernement. Il est, en effet, arrivé à maintes reprises qu’un responsable rende publiques des données d’un secteur donné avant qu’il ne soit corrigé par un ministre ou un autre supérieur. Dans d’autres cas, les chiffres ne sont même pas disponibles, rendant la prise de décision difficile, à l’exemple du marché informel. Pour ce dossier, les responsables qui sont succédé à tête du secteur du commerce n’ont pas manqué de le reconnaître, recommandant à chaque fois le lancement d’enquêtes pour élaborer une base de données autour de cette activité pouvant permettre d’arrêter les mesures de lutte contre ce phénomène. Jusque-là, rien n’est encore établi à cet effet. C’est le cas également pour la pauvreté, les terres agricoles détournées, l’emploi informel, le nombre de logements (occupés, distribués, réalisés ou en voie de réalisation), le tourisme et bien d’autres secteurs. Cela pour dire qu’en plus du problème récurrent de la fiabilité des chiffres, — l’approximation prend toujours place — se pose aussi celui de leur disponibilité. Démarche Un point que le Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, a évoqué en juin dernier devant les députés lors de la présentation du plan d’action du gouvernement. «A ce jour, nous ne possédons pas des statistiques exactes», a-t-il déploré appelant dans ce sillage à la mise en œuvre d’un plan national sur les statistiques en collaboration avec le ministère des Finances. En plaidant pour ce plan, le Premier ministre n’a toutefois pas dévoilé la conduite à suivre pour sa mise en œuvre. Mais surtout pour rendre l’information statistique plus accessible et plus fiable. Et ce, d’autant comme nous le dira Ahmed Mokaddem, expert statisticien et ancien directeur de l’Office national des statistiques (ONS), «l’information statistique est un élément contribuant à la bonne gouvernance et à la transparence». Mais faudrait-il que les responsables en place s’impliquent dans le travail à faire à cet égard. «La réussite de la démarche pour l’amélioration des systèmes d’information tant au niveau des ministères qu’au niveau local dépend fortement de la volonté des responsables à s’impliquer dans cette action qui est nécessaire pour une bonne gestion économique. Recommandations «Car il est de plus en plus admis que les principaux acteurs ont un réel intérêt à ce qu’un système d’information efficace existe, qui permette de partager l’information nécessaire à l’analyse, d’une part, et à l’aide à la décision, d’autre part. Ceci va dans le sens d’une volonté explicite à s’engager dans la voie de la modernisation des méthodes de travail», expliquera notre expert. Comment opérer dans ce cadre ? En réponse à cette question, M. Mokaddem nous dira qu’il y a lieu de proposer un système d’information consistant à apporter des éléments d’amélioration du système existant pour ne pas déstabiliser le fonctionnement actuel des services publics. «Ce qui existe doit être renforcé, mais ce renforcement doit se faire dans une perspective d’intégration des nouvelles technologies de l’information», plaidera-t-il. Et ce, avant de détailler les priorités à prendre en charge. Pour notre interlocuteur, il s’agit de la mise à niveau et de l’amélioration de la qualité des outils de gestion de l’information (numérisation, informatique, matériels et logiciels, méthodologies statistiques, programme d’enquêtes et d’études, etc.) ; la conception d’un système d’information en réseau collaboratif ; la formation des ressources humaines et l’accompagnement au changement technologique par la formation et l’assistance des professionnels concernés et de l’élaboration des manuels de procédures, de concepts et de définitions relatifs à chaque secteur et à chaque source. Sur un autre plan, l’adoption d’une approche locale dans la définition du système d’information est nécessaire. De même que l’amélioration de la gouvernance du système par le développement des méthodes et la responsabilisation des personnes, ainsi que la mise en place d’un cadre juridique qui institutionnalise le dispositif dans le cadre du respect du secret statistique, de la réglementation des connections entre bases de données, du respect de l’anonymat. Exemples Un travail de longue haleine doit donc être mené. En attendant, dans certains secteurs, l’on continue à faire appel aux institutions internationales pour l’élaboration d’une base statistique. Par exemple, dans le secteur du tourisme, l’Algérie a fait appel à l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) pour la mise en œuvre du programme de renforcement des capacités statistiques à l’échelon régional. Le premier atelier a eu lieu à Alger en février dernier. Son objectif : doter le secteur d’un système statistique de manière à pouvoir formuler des stratégies de commercialisation, renforcer les liens interinstitutionnels, évaluer l’efficacité des décisions de gestion et mesurer le tourisme dans toute l’économie nationale. A ce niveau, beaucoup reste à faire. Le ministre du Tourisme fraîchement installé a du pain sur la planche. Dans le secteur de la pêche, un nouveau système de collecte des statistiques sur les quantités de poisson pêchées est en cours d’élaboration au niveau de trois wilayas pilotes avec l’appui de l’organisation des Nations unies pour l’alimentation (FAO). Intitulé «SSPAL» (Système des statistiques de la pêche en Algérie), cet outil vise à assurer une meilleure fiabilité des données collectées sur les captures halieutiques. Il sera généralisé à tous les ports de pêche du territoire national avant la fin de l’année 2017 si le programme fonctionne dans les délais arrêtés. Dans domaine de l’agriculture, c’est le troisième recensement agricole qui est toujours en attente.  


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