«Il faut mettre en place une véritable politique nationale de l’emploi»



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- L’ONS a annoncé un taux de chômage de 12,3% en avril 2017 contre 10,5% en septembre 2016. L’organisme public impute l’aggravation du chômage principalement à l’augmentation du volume de la population en quête d’un emploi. Quelle est votre lecture ? Il y a lieu de souligner que le taux de croissance du PIB au premier trimestre 2017 a enregistré une légère baisse par rapport à la même période de l’année 2016, en passant de 3,9% à 3,7%. Il faut encore préciser que ce niveau de croissance a été maintenu grâce au rebond du secteur des hydrocarbures qui a enregistré une hausse de 7,1%. Le PIB hors hydrocarbures, quant à lui, a enregistré une baisse de 1,2%, en passant de 4% à 2,8% durant la même période. Les hydrocarbures sont un secteur capitalistique qui ne nécessite pas une grande quantité du facteur travail et sa croissance n’impacte pas sensiblement le niveau du chômage, surtout que l’industrie pétrochimique n’est pas vraiment développée. Le secteur de l’industrie et celui du BTPH ont connu un ralentissement en passant respectivement de 5,1% à 3,9% et de 4,4% à 3,8%. C’est cette situation qui, à mon avis, peut expliquer fondamentalement la montée du chômage. Ajoutons à cela le gel de la création des emplois dans la Fonction publique, y compris certains dispositifs d’insertion (DAIP, DAIS, DIP). En effet, selon l’ONS, la population active a atteint 12,277 millions de personnes contre 12,117 millions en septembre 2016, soit une hausse de 160 000 personnes. Cette augmentation n’est pas accompagnée par une croissance de la productivité de l’économie. L’Algérie, faut-il le rappeler, enregistre un taux de productivité très faible. La croissance de la productivité augmente moins que la population active et la conséquence est justement l’aggravation du taux de chômage. - Pensez-vous que la politique d’austérité budgétaire risque d’amplifier le chômage et les inégalités sociales ? La croissance économique du pays a été tirée pendant des années par la commande publique et l’encouragement de la demande globale, mais après la dégradation des positions financières externes et internes, le gouvernement a tenté un réajustement financier en ralentissant notamment les dépenses publiques et les importations. Ce réajustement budgétaire visant la limitation du rôle de l’Etat dans la croissance économique et le découragement de la consommation orientée à l’importation peut être considéré comme une politique d’austérité, ce qui décourage la création des emplois et peut conduire à un cercle vicieux de chômage, inflation et stagnation économique. Dans la situation actuelle, le secteur économique productif ne peut amortir le choc et constituer une alternative susceptible de maintenir un niveau de croissance et de création d’emplois. La productivité des entreprises, notamment publiques, est à remettre en question et leur assainissement n’a pas produit des gains en productivité. Le secteur privé est fortement dépendant de la commande publique et du système des subventions généralisées. C’est pourquoi l’Etat ne doit pas se retirer et recourir à des mesures d’austérité et de ralentissement de la consommation nécessaires à la relance économique.   - Selon vous, quelles sont les réformes nécessaires à mettre en place pour atténuer le chômage au moment où le gouvernement semble impuissant à lutter contre ce phénomène ? L’augmentation du chômage des jeunes est un phénomène à ne pas sous-estimer politiquement et socialement. Il relève de la stabilité nationale. Il faut mettre en place une véritable politique nationale de la formation et de l’emploi permettant une meilleure gestion des personnes qui arrivent sur le marché du travail. Il faut surtout une réforme structurelle profonde permettant de créer une compétitivité structurelle de l’économie et qui encourage des secteurs pourvoyeurs d’emplois. La tertiarisation de l’économie à travers les services des technologies de l’information et de la communication peut créer des opportunités de croissance économique et générer des emplois. Mais globalement agir sur le niveau de la productivité des facteurs et l’environnement des affaires qui demeure hostile. Les PME compétitives et les IDE doivent être encouragés pour faire face à la montée vertigineuse du chômage des jeunes (29%). Les mesures bureaucratiques sont inefficaces face au chômage.        


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