«L’Algérie n’a pas su gérer son parc automobile diesel»



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- La décision d’augmenter les prix des carburants a suscité de nombreuses réactions. Qu’en pensez-vous ? Il fallait tout d’abord préparer les automobilistes à cette augmentation en invoquant que les carburants sont subventionnés par l’Etat et qu’il y a trop de gaspillage. Des soupirants se sont succédé pour faire passer la pilule. Parmi ces soupirants, un grand nombre n’ont jamais payé leur carburant tout «en gardant et la voiture de service et parfois même le chauffeur», font la comparaison des prix des carburants en Algérie par rapport à ceux de la France. Les carburants en Algérie ne sont pas subventionnés. Comparons :   en France, l’essence SP à la pompe coûte 1,45 euro le litre. 72% de ce prix sont des taxes françaises, 3% représentent le transport du pétrole jusqu’en métropole, 7% c’est la part du raffinage et de la distribution, «la part du producteur de pétrole n’est que de 18%», les miettes correspondant à 0,26 euro/litre «équivalant à 32 DA/litre». A raison de 35,33 DA le litre de 2017, l’essence en Algérie était payée à sa juste valeur, vu que les salaires des Algériens sont à diviser au moins par dix par rapport à ceux des Français. - Quels sont les résultats à votre avis des mesures encourageant la consommation des carburants propres, notamment en ce qui concerne la réduction des importations ? L’Algérie importe une grande partie de sa consommation de gas-oil parce qu’elle n’a pas su gérer son parc automobile «diesel» qui surpasse la capacité de raffinage du pays. On a laissé le choix aux concessionnaires, sans rien leur imposer, d’importer selon leur intérêt les automobiles diesel parce qu’elles coûtent cher par rapport à l’essence, la marge bénéficiaire étant plus importante et pour les constructeurs et pour les importateurs. On n’a pas tenu compte non plus de l’importance de la pollution émise par le diesel. Les premières mesures à prendre et c’est presque trop tard sont : ne plus importer d’automobiles diesel, à l’exemple du Canada (le diesel y est banni) et les remplacer éventuellement par des véhicules au GPL, carburant largement disponible en Algérie, en raison des réserves importantes en GPL. Le prix d’achat d’un véhicule GPL est comparable à celui d’un véhicule essence, et moins élevé que celui d’un véhicule diesel, avec un avantage, le carburant le moins onéreux, but principal recherché du diesel (gas-oil moins cher que le super). Le parc automobile en Algérie se compose de 65% de véhicules diesel, et de 26% véhicules essence. La conversion au GPL ne concerne que les véhicules essence, elle ne s’applique pas au diesel. Deuxième mesure à prendre, et en urgence pour réduire toutes les consommations de carburant et ça concerne toutes les villes d’Algérie, organiser le vrai transport urbain et interurbain, car celui qui existe est dans un état d’anarchie avancé (le minibus ne démarre que s’il est archi plein de voyageurs, entassés comme des sardines. Le chauffeur ne respecte ni l’itinéraire ni encore moins les horaires et les fréquences, on peut attendre des heures pour voir un bus arriver). Il faut organiser un transport urbain et interurbain digne de ce nom, avec des directions bien définies, un maillage des lignes assurant toutes les correspondances pour n’importe quelle destination et surtout respecter les horaires, un voyageur ne doit pas attendre le bus plus de dix minutes. Aménager des parkings aux entrées des villes. C’est à ce prix que les conducteurs laisseront leur véhicule au garage ou au parking. C’est à ce prix qu’on fait les économies de consommation de tous les carburants. De toutes les façons, il n’ y a plus de choix, Il n’ y a plus de place pour permettre à tous les véhicules du parc algérien de rouler, et ce, dans toutes les villes du pays. On met deux heures pour parcourir une vingtaine de kilomètres, un cauchemar deux fois par jour pour aller au travail ou faire une course. Pourtant on a un très grand pays,  le plus grand d’Afrique. Mais 90% d’ Algériens vivent sur 5% du territoire, effet de l’exode rural. Avec le programme AADL et «les logements sociaux distribués gratuitement» on aurait pu faire l’effet inverse, pour réoccuper nos campagnes et mettre «peut-être ces bénéficiaires au travail» sur les terres abandonnées.   A propos de l’utilisation des carburants propres, il s’agit du GPL, gaz de pétrole liquide, mélange de propane et de butane. En raison de ses caractéristiques respectueuses de l’environnement et de la santé, le GPL «largement disponible en Algérie», devait faire partie des carburants destinés à prendre part de plus en plus importante dans le parc  automobile du pays. Il est reconnu comme l’une des meilleures alternatives possibles aujourd’hui pour limiter les phénomènes de pollution dans les villes. La combustion du GPL carburant ne laisse pas de calamine au niveau des soupapes, le moteur ne s’encrasse pas, au bénéfice de la longévité de la mécanique. Comparativement à l’essence, le GPL produit 97% de monoxyde de carbone (CO) en moins et 20% de dioxyde de carbone (CO2) en moins, gros avantage pour les villes. L’autonomie du réservoir de GPL est de 400 kilomètres en plus du réservoir essence. Un véhicule qui consomme 6 litres/ 100 km d’essence consommera 7,5 litres/100 km de GPL, vite compensés par rapport au prix du carburant le moins cher. - Quelles sont les contraintes qui bloquent la généralisation de l’utilisation des carburants propres ? Le prix du carburant actuel, excessivement cher par rapport aux salaires, va inciter beaucoup d’automobilistes à opter pour le GPL. Mais la conversion ne peut éventuellement s’appliquer que parmi les 26% des véhicules essence seulement. Les 65% des véhicules diesels sont là et il faut gérer leur consommation gas-oil. Inconvénient : le réservoir GPL, peut s’avérer encombrant, la voiture n’ayant pas été conçue dès l’origine pour accueillir ce système. Ce réservoir a tendance à condamner une partie du coffre arrière. Pour les véhicules neufs au GPL, le choix des marques n’est pas répandu, à part Fiat, Citroën, Dacia, Opel, Alfa Roméo qui proposent des modèles de véhicules neufs équipés de deux réservoirs, essence et GPL, les constructeurs ne se bousculent pas pour ajouter le concept. L’idéal c’est de placer le réservoir GPL sous le châssis du véhicule, à côté du réservoir essence, à commencer à l’imposer sur les véhicules montés en Algérie avant de généraliser le principe, comme option par cahier des charges, à d’autres marques. - Comment revoir les subventions des produits énergétiques ? Le prix de vente actuel du gaz naturel aux clients étrangers de Sonatrach est de 3,5$/Mbtu, équivalent à 350 DA/Mbtu. En ce qui concerne l’électricité 1Mbtu = 293 KWh, d’où 350$/293 =1,20 DA/KWh équivalent à l’exportation. Le prix appliqué de la première tranche par Sonelgaz (la moins onéreuse) pour le client algérien 1,7727 DA/KWh est supérieure au prix équivalent de l’exportation. L’Algérien paye l’électricité plus cher par rapport au prix de l’exportation. En ce qui concerne le gaz, on va voir le prix autrement en cherchant sa vraie valeur pour tout le monde. Un baril équivalent-pétrole (1 bep) = 5,5 Mbtu. Le prix de vente du gaz par rapport au pétrole est de 3,5$ x 5,5 = 20$/bep.  Ce prix de vente du gaz est divisé par 3 par rapport au prix actuel du pétrole (60$/baril). Ce décalage du prix par rapport au pétrole, provient de son indexation sur la partie la moins noble du pétrole qui est le fioul. En plus, ce qu’il faut savoir, c’est qu’une calorie gaz, qui revient plus de cinq fois plus cher que la calorie pétrole, est vendue trois fois moins cher. Je m’excuse auprès des lecteurs d’avoir à leur infliger tous ces chiffres. C’est le seul moyen de convaincre les nostalgiques de vendre le gaz à n’importe quel prix. Ce qu’il faut savoir aussi, quand le gaz «produit non renouvelable» se vendait à 2 dollars/Mbtu, il était offert aux clients étrangers de SH gratuitement, car les 2 $ ne couvraient même pas les dépenses de son traitement, encore moins les amortissements. Et on parle de subvention énergétique ! En conclusion : Je reviens au GPL, qui provient, 40% du pétrole et 60% du gaz, est la partie la plus noble des hydrocarbures, très recherchée pour la pétrochimie, aurait pu inverser, à 180° le cours de l’histoire de l’Algérie et son développement. Transformé à l’état solide, c’est là le mérite de sa noblesse, c’est une matière recyclable à l’infini au lieu de partir en fumée.


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