Omra

les dessous d’un business pas toujours net



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Les annonces liées à l’organisation de voyages spécial «Omra» pullulent sur le Net, occupent de grands espaces dans les journaux et sont facilement repérables dans les grandes surfaces commerciales. Tout est fait pour attirer les candidats à la Omra via des offres qui diffèrent d’une agence à une autre, mais qui promettent une prise en charge au top une fois aux lieux saints. C’est le cas justement en cette période de l’année avant la fermeture de la saison Omra et la préparation du Hadj. Le mois de Ramadhan est en effet propice pour cette visite touristique et religieuse, surtout durant la deuxième quinzaine. Les agences ne veulent pas rater cette occasion pour faire des bénéfices. Elles sont d’ailleurs de plus en plus nombreuses à investir ce créneau. Le président du Syndicat national des agences de voyages, Bachir Djeridi, nous le dira d’ailleurs : «90% des demandes d’agrément d’agences de voyages sont motivées par la Omra et le Hadj. Nous faisons partie de la commission nationale chargée de la délivrance de ces autorisations et c’est ce que nous avons constaté.» Un point que confirmera l’expert en tourisme, Saïd Boukhelifa, qui notera : «Sur les 2250 agences existantes, 1800 sont versées dans la Omra. En plus, elles travaillent en louant les diplômes de l’Ecole supérieure du tourisme.» Donc, comme dans chaque marché jugé juteux, le recours aux astuces pour faire des affaires se fait de plus en plus important. Les agences de voyages qui commercialisent le produit Omra le font soit directement, soit en sous-traitant avec les agences agréées) à cet effet. Car, pour pouvoir proposer le package Omra, il faut avoir l’agrément IATA (Bureau international du transport aérien), qui est une garantie de la crédibilité de l’agence de voyages. Ceux qui ne l’ont pas font justement appel à celles ayant déjà cet agrément pour l’organisation de ces séjours touristiques et religieux. D’autres s’érigent tout simplement en intermédiaires pour négocier avec les agences en question, en leur proposant des groupes à prendre en charge. Ces intermédiaires qui recourent à cette pratique de manière illégale tirent bien sûr profit de cette opération en prenant leur commission. Et bien sûr en arnaquant leurs clients. «Mais, c’est risqué de travailler avec ces gens. Nous préférons éviter les problèmes avec nos clients. Nous traitons directement avec eux, sinon dans le cadre de la sous-traitance», nous dira la représentante de Mouia Voyages, une agence sise à Beaulieu (El Harrach), qui travaille dans ce créneau depuis 18 ans. «Il arrive que des intermédiaires viennent vers nous de régions qui ne disposent pas d’agences de voyages nous solliciter pour leur organiser des voyages Omra. Mais, nous refusons de le faire», nous confiera la représentante de ladite agence, avant de résumer : «Il y a les professionnels, ceux qui sous-traitent et ceux qui trichent malheureusement.» C’est justement cette dernière catégorie qui est la source des problèmes rencontrées sur les Lieux saints par les gens qui partent effectuer la Omra. «Quand les clients nous sollicitent directement, on leur explique tout : des procédures à accomplir avant le voyage jusqu’aux conditions de prise en charge à Médine et à La Mecque», nous expliquera encore notre interlocutrice. Et ce, avant de préciser que les tarifs varient d’une saison à une autre, mais aussi en fonction de la billetterie et de l’hôtellerie. «Un package avec un vol direct et un hôtel pas loin du Haram coûte bien sûr plus cher. En février, par exemple, il était de 180 000 dinars. Quand il y a escale et qu’en plus le lieu d’hébergement est loin du Haram, le prix diminue. Il y a aussi des prises en charge en VIP dans des hôtels cinq étoiles avec demi-pension. On donne même à nos clients des détails sur la restauration, notamment sur la nationalité des traiteurs», nous détaillera-t-elle, non sans préciser que la marge, c’est-à-dire la commission de l’agence n’est pas très importante. «On gagne très peu, 5000 dinars par personne», nous dira-t-elle. Pour cette saison, le marché ne s’annonce pas important. «Par rapport à l’année dernière, la demande a baissé», constatera-t-elle, liant cela à la taxe de 2000 rials (100 000 dinars) imposée à toute personne ayant déjà effectué la Omra. Mais, globalement, il est encore trop tôt pour faire le bilan de cette saison puisque nous ne sommes qu’au début du mois de Ramadhan. «Un marché de gros sous» Saïd Boukhelifa estime pour sa part la marge des agences à 10 000 dinars par client au minimum. Cela pour dire que les bénéfices, même s’ils sont jugés insignifiants du côté des agences, sont bien là. D’où l’engouement pour ce créneau. Ce que confirmera le président du syndicat. «Dire que les agents ne tirent pas de bénéfices de la Omra est faux. C’est un marché de gros sous. Les agences ne sont pas perdantes», fera-t-il remarquer, regrettant le fait que ce service soit investi par «des opportunistes et des étrangers à la profession». Ce qui est à l’origine de tous ces dysfonctionnements et du mécontentement des Algériens qui font le déplacement pour l’accomplissement de ce rituel religieux. «On s’étonne quand les gens proposent une Omra à 120 000 dinars, alors que le billet coûte dans les 90 000 dinars. Ils (ndlr, les organisateurs de voyages) ont plein d’astuces pour jouer sur ces tarifs. Ils réservent sur les vols avec escales et assurent l’hébergement loin du Haram. Une fois sur place, les gens se rendent compte de l’arnaque», soutiendra M. Djeridi. Pour ce syndicaliste dont l’agence ne propose pas ce produit, il y a lieu d’assainir en commençant par définir les voyagistes défaillants. C’est là que devrait justement intervenir le rôle de l’Office de la Omra et du Hadj (dont les tentatives de joindre ses responsables ont été vaines). «L’Office est censé suivre de près le dossier et mettre fin à ces défaillances. Or, ce n’est pas le cas. Il ne joue jamais son rôle. Il ne fait absolument rien, alors qu’il doit assurer l’assistance au départ et à l’arrivée. Il s’enrichit sur le dos des agences en percevant sur chaque client à destination des Lieux Saints 2500 dinars sans même donner un reçu en contrepartie», nous expliquera M. Djeridi. Avec une moyenne de 300 000 Algériens qui effectuent ce voyage (mouetamir) tous les ans, l’Office perçoit ainsi 750 millions de dinars. Interrogé sur le poids de cette filière, le responsable syndical estime difficile de faire une évaluation en l’absence de données exhaustives et d’un observatoire chargé justement de constituer cette base de données, pas seulement pour la Omra, mais pour toutes les prestations touristiques «C’est la débandade totale», regrettera-t-il, insistant encore sur le rôle de l’office. Mais aussi sur la responsabilité des clients qui s’adressent à des non professionnels. «Le problème des rabatteurs vers des agences de voyages qui prennent un nombre important en baissant les prix avec des prestations de mauvaise qualité nuit à ce marché», notera encore M. Djeridi. Et ce, au même titre que ceux qui ont recours à des pratiques illégales, comme l’affaire divulguée en mars dernier. Arnaques Certaines agences de voyages, dont le nombre serait entre 30 et 40 en attendant les résultats de l’enquête, ont avancé de faux passeports pour ne pas payer la taxe de 2000 rials saoudiens imposée à tout pèlerin ayant accompli le Hadj ou la Omra durant la période 2015-2016. De fausses dates de départ ont également été avancées. Ce qui a amené le consulat d’Arabie Saoudite en Algérie à bloquer la procédure pour quelques jours, en avisant les autorités algériennes sur ces dépassements. Un rapport a été soumis au ministre du Tourisme et de l’Artisanat. Cette affaire, faut-il le souligner, a pénalisé l’ensemble des agences de voyages qui ont dû attendre longtemps pour obtenir des visas par le consulat d’Arabie Saoudite à Alger. D’où la nécessité d’assainir cette activité. Le SNAV insiste d’ailleurs sur l’identification des défaillants. «On attend du ministère des Affaires religieuses de nous donner cette liste», soutient M. Djeridi. Dans ce cadre, justement, l’office a arrêté la semaine dernière une liste de 210 agences agréées pour les voyages religieux. Il en a exclu sept et suspendu sept autres. Mais cela ne règle pas l’organisation de cette filière assujettie aux pratiques douteuses. Les clients, essentiellement les personnes âgées, sont les premières victimes de ces escroqueries. En 2016, 47 pèlerins algériens partis en Arabie Saoudite avaient été dupés. Les visas qui leur avaient été délivrés pour accomplir le pèlerinage étaient dépourvus d’autorisation. Heureusement que le problème avait été réglé sur place. Mais les responsables de l’agence «arnaqueuse» ont bien empoché l’argent sans toutefois accomplir la prestation. Des cas de mécontentement sont régulièrement rapportés, mais ça continue encore. Une fois sur place, c’est la grande déception. Certes, beaucoup reviennent satisfaits des prestations assurées, mais autant rentrent en Algérie déçus après avoir été livrés à eux-mêmes. «Sur place, le guide disparaît, on se débrouille comme on peut». «On ne savait pas si on allait être pris en charge en demi-pension ou non. C’est une fois sur place que nous avons découvert les conditions d’hébergement et de restauration». «Pour partir à la mosquée, on doit marcher sur une longue distance, alors que nous nous attendions à être logés pas loin du Harem. A la dernière minute, on a dû nous transférer ailleurs. L’hôtel était pris». «En résumé, ils vous vendent du rêve et une fois sur place, vous laissent seuls». Ce sont quelques-uns des témoignages recueillis auprès de ceux qui ont vécu cette expérience. Du travail reste à faire donc pour améliorer les prestations et faire le tri dans un créneau de plus en plus investi, même si certains préfèrent ne pas s’engager dans ce segment qu’ils jugent loin d’être rentable eu égard aux difficultés sur le terrain : de la billetterie jusqu’à l’hébergement. C’est le cas de ce voyagiste installé à Dar El Beïda, pour qui il y a trop d’aléas entre les irrégularités du transport aérien, les réservations d’hôtels et les visas. La dévaluation du dinar n’arrange pas les choses. Il y aussi la caution de 10 millions de dinars que les agences algériennes doivent déposer dans les banques saoudiennes comme garantie aux partenaires saoudiens. En effet, les quelque 300 agences (210 actuellement avec la nouvelle liste) qui s’occupent de Omra sont obligées de déposer cette somme en Arabie Saoudite. Et pourtant, une proposition a été soumise aux pouvoirs publics pour que les banques algériennes prennent la question en charge, c’est-à-dire que l’argent soit déposé en Algérie et que les relations se fassent entre banques algériennes et saoudiennes. «Mais personne ne répond. C’est une opération technique mais faisable», nous dit-on au SNAV. Pour rappel, cette mesure est en vigueur depuis plusieurs années et le montant a été revu à la hausse il y a cinq ans. Ainsi, la caution est passée de 5 à 10 millions de dinars.


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