Exclusif. Abdelaziz Bouteflika et Ahmed Gaïd Salah

les véritables secrets d’une amitié inébranlable



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Abdelaziz Bouteflika, Président de la République, âge : 81 ans.  Ahmed Gaïd Salah, chef d’Etat-Major de l’Armée Nationale et Populaire (ANP), âge : 78 ans. Ces deux hommes sont aujourd’hui les deux piliers de l’Etat algérien. Beaucoup de rumeurs circulent sur leurs relations. Mais peu de personnes connaissent les véritables dessous de leur “amitié”. Oui, une longue et inébranlable amitié car Abdelaziz Bouteflika accorde une confiance aveugle à Ahmed Gaïd Salah. Et ce dernier voue une fidélité absolue à Abdelaziz Bouteflika.  Et contrairement à toutes les rumeurs et spéculations affolantes, les deux hommes n’ont jamais été aussi proches l’un de l’autre notamment depuis l’éclatement de l’affaire de la cocaïne du Port d’Oran. Algérie Part a mené ses investigations. 

Nous sommes en mai 2013. A Saïd Hamdine, dans la banlieue d’Alger, une réunion hyper-confidentielle est organisée au niveau de la très discrète cité résidentielle “des 27 villas”, les fameuses villas habitées par plusieurs importants officiers supérieurs des services de renseignement et de l’Etat-Major comme le général Ahmed Kherfi, l’homme qui  a succédé au célèbre général Smaïn Lamari, l’ex patron du contre-espionnage.

Dans l’une de ces villas où le culte du secret est une valeur maîtresse, de nombreuses personnalités militaires ont été réunies pour étudier un sujet très délicat : la dégradation de l’état de santé d’Abdelaziz Bouteflika qui était hospitalisé à Paris à l’hôpital Val-de-Grâce depuis le mois d’avril de la même année 2013. On attribuera à cette réunion un nom qui reste jusqu’à aujourd’hui inexpliqué et mystérieux : “la réunion des 80” !

S’il est impossible d’établir avec précision le nombre précis des participants à cette réunion secrète, nous avons pu confirmer au cours de nos investigations que les officiers les plus influents de l’institution militaire et des services secrets étaient bel et bien présents dans l’une des villas de la secrète résidence des 27 de Saïd Hamdine. Il s’agit notamment du général Toufik, M’henna Djebbar, le général Attafi, Bachir Tartag, Ahmed Gaïd Salah et Abdelmalek Guenaizia, l’ancien ministre délégué auprès du ministre de la Défense nationale algérien, ainsi que d’autres généraux et officiers comme Abdelhamid Bouhidel.

L’atmosphère fut tendue, les visages fermés et les mines sombres. Au cours de cette réunion, il fallait trancher sur une question fondamentale qui devait déterminer par la suite l’avenir de l’Algérie : quelle est la position que doit adopter l’institution militaire face à la maladie du Président Bouteflika ? Faut-il continuer à le soutenir ou doit-on préparer d’ores et déjà sa succession ? La question divise et les positions des uns et des autres ne font pas l’unanimité. Un plan d’action a été proposé pour parer à la crise que la vacance du pouvoir pourrait provoquer. Mais ce plan ne verra jamais le jour.

Et pour cause, le soldat Ahmed Gaïd Salah sort de cette réunion avec une seule et unique résolution : monter à Paris pour avertir le Président Bouteflika et lui rendre compte de ces manœuvres qui se trament à son insu. Gaïd Salah s’exécute et part en urgence  à Paris pour rencontrer tout seul Abdelaziz Bouteflika au chevet de son lit. Averti, le président Bouteflika écoute les conseils de son ami le général le plus fidèle au sein de  l’armée. Les deux hommes tombent d’accord sur une riposte et un plan d’action pour contrer la moindre velléité visant à semer le doute sur la pérennité du pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika.

Quelques jours plus tard, le mercredi 12 juin 2013, l’agence de presse APS diffuse les premières photos du président  Abdelaziz Bouteflika depuis son hospitalisation en France fin avril. Une vidéo qui fait taire les rumeurs sur l’éventuel décès du président Bouteflika, invisible à l’époque dans les médias.

Les photos ont montré Abdelaziz Bouteflika, habillé d’une robe de chambre, en compagnie de Abdelmalek Sellal, le Premier ministre à cette époque-là, et du trimpphant chef d’état-major de l’armée Ahmed Gaïd Salah, dans un des salons de l’établissement de santé des Armées des Invalides à Paris où il a été transféré après son hospitalisation à l’hôpital du Val-de-Grâce. Au cours de cette audience, il est apparu assis dans un fauteuil, buvant du café et bougeant ses membres supérieurs.

Les deux hommes ont réussi leur coup et Bouteflika sort vainqueur. En 2014, le nettoyage effectué par Ahmed Gaïd Salah pour empêcher la moindre contestation au sein de l’institution militaire contre le 4e mandat sera énormément précieux pour un Abdelaziz Bouteflika qui se maintiendra ainsi au pouvoir en balayant d’un revers de la main tous les pronostics qui lui ont étaient défavorables.

Ensemble et unis, Ahmed Gaïd Salah et Abdelaziz Bouteflika ont vaincu tous les récalcitrants et les opposants à leurs desseins politiques. Mais cette amitié et alliance ne date pas de 2013. Non, il faut remonter aussi jusqu’à 2004 où Ahmed Gaïd Salah a joué un rôle très important dans la mise à l’écart du puissant général Mohamed Lamari, à l’époque chef d’Etat-major de l’ANP. Ce haut gradé ne cachait pas son hostilité à Abdelaziz Bouteflika et complotait dans les coulisses pour l’empêcher de continuer à présider aux destinées de l’Algérie.

Avec le soutien et l’appui de Gaïd Salah, Abdelaziz Bouteflika sort vainqueur de son bras-de-fer contre Mohamed Lamari et ses acolytes. A cette époque-là, Abdelaziz Bouteflika fera à son ami Gaïd Salah une déclaration qui restera gravée dans les mémoires : “Nous sommes venus ensemble, nous partirons ensemble” !

Et le temps démontrera que Bouteflika respectera cet engagement. Preuve en est, au printemps 2015, un important remaniement ministériel se négocie. Le clan présidentiel tente de renforcer ses tentacules et cherche à écarter définitivement le général Ahmed Gaïd Salah de la scène politique en lui enlevant le poste de vice-ministre de la Défense qu’il occupe depuis septembre 2013. Le projet est approuvé et la liste est envoyée au Président Bouteflika. A la place de Gaïd Salah, on insère le nom d’Ahmed Ouyahia. Le Président Bouteflika s’énerve et frappe du poing sur la table. Il refuse catégoriquement que l’on touche à son ami le général. Ahmed Gaïd Salah sera maintenu dans ses fonctions de vice-ministre de la Défense nationale au grand dam de ses détracteurs et adversaires.

Et aujourd’hui, qu’en est-il de cette amitié stratégique ? Elle n’a jamais été aussi forte, a-t-on confirmé au cours de nos investigations. Depuis l’éclatement de l’affaire de la cocaïne du Port d’Oran, le président Bouteflika a donné les pleins pouvoirs à son ami Gaïd Salah pour piloter le nettoyage des écuries d’Augias. Les Limogeages d’Abdelghani Hamel, du général-major Boudjemaâ Boudouaour et le remplacements de plusieurs hauts fonctionnaires ou dirigeants, Ahmed Gaïd Salah a obtenu le feu vert du président Bouteflika dans plusieurs dossiers délicats et sensibles.

Le général Ghali Belkecir, le nouveau Commandant de la Gendarmerie nationale, et le colonel Mustapha Lahbiri, nommé à la tête de la DGSN, obéissent à la lettre au chef d’Etat-Major de l’ANP. Tous les comptes-rendus passent par son bureau. Quant à l’enquête sur l’affaire de la cocaïne et “de Kamel le Boucher”, tous les rapports sont étudiés et analysés par le cabinet du chef d’Etat-Major de l’Armée avant d’établir des synthèses qui seront remises au Chef de l’Etat.

Après 2004, 2013 et 2014, l’amitié inébranlable d’Abdelaziz Bouteflika avec Ahmed Gaïd Salah sera certainement la pièce centrale de l’échiquier politique algérien de 2019.

 

 


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