L’Algérie demande la réactivation de l’UMA

Le Maroc face à ses contradictions



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L’Algérie appelle à la réactivation de l’Union du Maghreb arabe (UMA). Elle a saisi le secrétaire général de l’UMA pour «l’organisation d’une réunion du conseil des ministres des Affaires étrangères de l’Union dans les meilleurs délais», selon des sources citées par l’agence officielle APS.

Cette demande est motivée par «les conclusions du dernier sommet extraordinaire de l’Union africaine, tenu les 17 et 18 novembre 2018, sur les réformes institutionnelles de l’organisation continentale, qui a accordé un intérêt particulier au rôle des ensembles économiques régionaux dans les processus d’intégration des pays africains». En demandant cette réunion, l’Algérie veut ainsi démontrer son attachement à l’unité maghrébine. La démarche algérienne sonne comme une réponse indirecte à l’appel du roi du Maroc Mohammed VI, le 6 novembre, à un dialogue «franc et direct».

C’est aussi un test de sincérité et de bonne foi pour le roi Mohammed VI, qui a dit, dans son discours à l’occasion du 43e anniversaire de la Marche verte, vouloir reprendre langue avec l’Algérie pour reconstruire les relations bilatérales. Un test pour le roi Mohammed VI qui s’est distingué par son boycott systématique de toutes les réunions de l’UMA, arguant que cet ensemble régional, influencé par l’Algérie, ne défend pas l’intégrité territoriale de son pays. Autrement dit, le Maroc rejette l’UMA parce qu’elle ne soutient pas son plan d’autonomie du Sahara occidental.

L’Algérie, qui a toujours œuvré pour que la question du Sahara occidental reste au niveau des instances onusiennes qu’elle soutient dans leur démarche de règlement de ce conflit, continue donc à plaider pour une Union du Maghreb forte. L’Algérie, comme le rappelle la source de l’APS, «a toujours été confiante quant à la capacité de l’UMA de peser de tout son poids sur les rapports de force, tant au niveau régional qu’international, en témoigne son adoption de 29 conventions sectorielles sur un total de 36 conclues depuis la création de cette Union en 1989, aux côtés du Maroc (8 conventions), de la Tunisie, de la Mauritanie (28 conventions) et de la Libye (35 conventions)».

C’est aussi une manière pour l’Algérie de démontrer que le Maroc n’a jamais été favorable au dialogue ni à la construction d’un ensemble régional fort. La preuve est qu’il est le pays qui a signé le mois de conventions de l’UMA. Ainsi donc, quand le Maroc œuvre et manœuvre pour bloquer les activités de l’UMA en refusant d’y participer, l’Algérie s’attelle à trouver les ressources nécessaires pour relancer cette organisation régionale et donner une «impulsion» à l’action commune des cinq pays membres. Elle le fait même à travers la conception de grands projets structurants au niveau national, qui prennent en charge cette dimension régionale.

La preuve est la réalisation de l’autoroute Est-Ouest qui relie la frontière marocaine à la frontière tunisienne. C’est grâce à l’Algérie qu’en 2012 a eu lieu, à Alger, une session extraordinaire du conseil des ministres des Affaires étrangères des pays de l’UMA. Une session qui a été consacrée à la problématique de la lutte contre le terrorisme. Le président Bouteflika a appelé en février 2018, à l’occasion du 29e anniversaire de la création de l’UMA, à relancer l’Union, estimant qu’il s’agissait d’un «choix stratégique» pour l’intérêt des pays membres. Dans le message adressé à Mohammed VI, le président Bouteflika avait souligné que «cet anniversaire historique est une occasion pour rappeler les relations de fraternité, de solidarité et de bon voisinage liant les peuples maghrébins ainsi que les constantes civilisationnelles qu’ils ont en partage et leur communauté de destin».

Créée en 1989, l’UMA n’a pas tenu de sommet depuis 1994. Une année qui a été marquée par les attentats terroristes commis à Marrakech. Des attentats que les hauts dirigeants marocains ont utilisés pour nuire à l’Algérie, déjà plongée dans un chaos terroriste. En effet, les autorités marocaines se sont empressées d’accuser l’Algérie d’avoir été derrière ces attentats, imposant de manière unilatérale un visa d’entrée aux Algériens. Ce à quoi les autorités algériennes de l’époque ont réagi avec célérité en procédant à la fermeture pure et simple de la frontière.

Si après le fameux tête-à-tête entre Bouteflika et Mohammed VI en marge du sommet arabe à Alger en 2005 les deux pays ont annulé réciproquement le visa d’entrée, l’Algérie exige le règlement du contentieux avant d’accéder à la demande marocaine de réouverture de la frontière terrestre toujours fermée.

Ce contentieux concerne notamment les biens d’Algériens spoliés par les autorités marocaines suite à la chasse aux Algériens, organisée au lendemain des attentats terroristes de Marrakech. Mais le Maroc n’a jamais accepté d’ouvrir ce dossier. Pis encore, les autorités de ce pays ont pendant des années affiché ouvertement leur hostilité à l’égard de l’Algérie, accusée à tort d’être le source de tous les maux qui ronge ce voisin de l’Ouest. Le gouvernement marocain ne s’est toujours pas excusé de la violation d’une enceinte diplomatique algérienne à Casablanca et la profanation du drapeau algérien le 1er novembre 2013.

L’auteur de cet acte de vandalisme n’a d’ailleurs été condamné qu’à 2 mois de prison avec sursis. Un verdict jugé complaisant, qui n’a fait qu’attiser la crise entre les deux pays. Les provocations marocaines n’ont jamais cessé. Elles ont continué jusqu’à cette «main tendue» du roi Mohammed VI à l’Algérie, qui intervient à la veille de la reprise du processus de négociation avec le Front Polisaria à Genève, sous l’égide des Nations unies.

Une manœuvre que l’Algérie semble avoir réussi à déjouer en évitant la «bilatéralisation» de ce conflit. En appelant à la réactivation de l’UMA, l’Algérie a indirectement signifié au Maroc que s’il veut sincèrement le dialogue, il doit d’abord le faire dans ce cadre multilatéral. La balle est donc désormais dans le camp marocain. 


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