Le juriste Battache

« Répondre à un besoin algérien… »



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Paru chez ENAG éditions, le lexique du droit algérien offre un raccourci aux professionnels rendant, le travail de recherche et de documentation plus simples. Il s'agit avant tout d'un outil qui normalise les termes juridiques. Tous les secteurs d'activités sont regroupés avec une utilisation bilingue (Arabe et Français). D'ailleurs, l'auteur nous explique dans cet entretien au Jeune Indépendant, comment cet ouvrage contribue à la valorisation de l'information juridique, et ce, en revenant sur le contenu.

Comment avez-vous eu l'idée de mettre à la disposition des professionnels algériens un lexique juridique ?
Dans ma carrière professionnelle, j'ai eu l'occasion de dispenser pendant trois (03) années successives à l'Institut National du Travail (INT) du module de terminologie juridique pour le corps des inspecteurs du travail pour l'obtention des titres d'inspecteurs principaux. Au début, comme tout perfectionniste, je me suis demandé quelle serait la meilleure manière de le faire, alors j'ai commencé à chercher dans la bibliothèque familiale sans rien y trouver. Faisant le tour de quelques librairies idem, le service de documentation de l'Inspection Générale du travail que je dirigeais à l'époque ne comportait pas d'ouvrages ayant trait à cette spécialité et également pour le Ministère du travail, de l'emploi et de la sécurité sociale. Cette insuffisance m'a poussé à m'inspirer des quelques insertions sur le net qui ne dépassaient guère le stade de l'initiation et ne correspondaient absolument pas aux objectifs recherchés par la dispense du module en question qui devait répondre en premier lieu à un besoin éminemment algérien. C'est alors que l'idée m'est venue de confectionner dans une première étape un lexique juridique spécialement sur le monde du travail regroupant toutes les définitions adoptées par le législateur algérien (ne dépassant pas les 300 définitions) et qui a servi par la suite de support de cours au profit des élèves inspecteurs principaux du travail. Cette recherche m'a encouragé à approfondir la prospection pour toucher tous les autres secteurs d'activité en collectant toutes les définitions adoptées depuis 1962 débouchant ainsi sur plus de 4500 définitions. Voyant ce travail, des professeurs, des collègues et amis m'ont alors incité à le publier pour sa valeur juridique, pédagogique et technique.

Parlons d'accessibilité. Le vocabulaire employé dans cet ouvrage a-t-il besoin d'une initiation de la part de l'utilisateur ?
La maniabilité de ce travail n'a nullement besoin d'une personne avertie pour son utilisation, ce dictionnaire concerne toutes les tranches d'âge et tous les niveaux de responsabilité et couvre tous les secteurs d'activité. Le langage du droit n'est pas rude comme le prétend quelques non-initiés. Il est vrai que la terminologie juridique est assez particulière mais pas assez compliquée. Lorsque le législateur adopte des définitions, il simplifie avant tout la compréhension du langage juridique.
Il faut reconnaitre aussi que certaines terminologies ne sont pas anodines d'où la nécessité de s'atteler à apprendre ce vocabulaire. De toutes les façons nous acheminons de plus en plus à l'utilisation graduelle du vocabulaire juridique qui ne cesse d'accaparer une place de plus en plus importante dans notre langage au quotidien en général, et dans notre langage professionnel en particulier.
De plus, son classement des définitions par ordre alphabétique que ce soit en français ou en arabe, par le simple recours à l'index, ce lexique a aussi le privilège d'apporter à chaque définition sa référence juridique ce qui facilite encore son utilisation et l'approfondissement de la recherche. Enfin il ne faut pas perdre de vue que la communication juridique est avant tout écrite et le droit puise la plupart de ses mots dans la langue courante à l'exemple des mots contrat, divorce, loi, sécurité,…

Peut-on parler d'un recueil qui met en exergue les différents accords, traités, protocoles parus dans le journal officiel ?
Ce lexique juridique a la vocation de fournir, harmoniser et normaliser les termes juridiques sans lesquels il n'y a pas de communication nationale efficace, répondant à des critères de fiabilité, pertinence, et sûreté d'utilisation. A ce propos il est utile de rappeler que nous avons passé en revue toutes les conventions, accords, traités, protocoles et statuts d'envergure internationale ratifiés par l'Algérie, les lois organiques, lois et ordonnances, les décrets législatifs, présidentiels et exécutifs, les arrêtés interministériels et arrêtés et enfin tous les règlements,… tous parus dans le journal officiel de la république algérienne démocratique et populaire depuis l'indépendance à ce jour.
Enfin, la partie exposant les définitions en arabe est une faculté supplémentaire de ce lexique, non seulement dans le cadre de l'utilisation bilingue mais aussi pour permettre à l'utilisateur de mieux se conformer à une traduction certifiée. Ce lexique vient aussi remédier aux nombreuses lacunes de la formation des traducteurs et traductrices et de renseigner sur la traduction juridique officielle. Egalement ce lexique répond parfaitement aux terminologues qui pointent l‘imperfection et la rareté de ces outils, voire les lacunes de traduction souvent présentes dans les dictionnaires juridiques.

Quel est le rôle du référent juridique à travers les définitions utilisées ?
De nos jours, l'enseignement et l'apprentissage du langage juridique représente un domaine d'activité très important d'où la présence des services juridiques dans la quasi-totalité des institutions, administrations, entreprises publiques et privées. Les risques de situations contentieuses dans les opérations complexes d'élaboration et de mise en œuvre de projets et programmes notamment ceux de grande envergure et les enjeux y afférent nécessitent de préparer l'encadrement à affronter ces situations juridiques et à s'entourer suffisamment de la fonction juridique notamment lorsque la question relève de litige de droit national ou international. Ce lexique vient conforter ces acteurs en leurs procurant les « clés de recherche » pour parvenir en un temps record aux outils juridiques nécessaires et d'en faire le parfait usage.
Aussi, en sus de l'importance de maitriser la protection juridique, il y'a lieu de souligner que dans beaucoup de domaines comme la science, la technologie ou l‘économie, l‘évolution du monde contemporain a rapproché les mots et dans beaucoup de cas ces mots ont un même référent universel et donc un équivalent exact d'où l'importance des références citées dans le lexique. D'un autre point de vue, ce lexique est également conçu comme un outil d'aide à la décision pour le chercheur en droit, étudiants et doctorants car il répond à un enjeu crucial, celui d'une meilleure valorisation de l'information juridique dont les sources (références) contribuent à inscrire leurs travaux dans une démarche conforme à l'éthique et le respect méthodologique.

Le langage formant un discours combine à la fois vocabulaire et phrases. Le lien entre le droit et la langue suffit-il pour prétendre à l'existence d'un langage juridique ?
Le droit s'exprime par la langue (loi, jugements,…) et par les signes (panneaux, étiquettes, feux de signalisation,…) et le sens de ces derniers sont fixés par la langue. Ainsi, le droit comme je l'ai bien dit puise la plupart de ses mots dans la langue courante et notre langage au quotidien en général. Mais dans notre langage professionnel, on utilise graduellement du vocabulaire juridique ce qui démontre bien que le droit et la langue sont indissociables sauf que leurs processus de formation sont opposés et que pour le premier (le droit) c'est la volonté collective qui fixe les règles, pour le second (la langue) chaque individu est compétent. Ainsi le langage juridique est une langue « spécialisée » qui doit être comprise par tout le monde puisque dans tous les pays « nul n'est sensé ignoré la loi ».


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