«Une peinture très décalée par rapport aux artistes officiels de la conquête»



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– Printemps algérien. Votre intitulé a été rejoint par l’actualité sociale et politique en Algérie. Qu’est-ce que cela évoque pour vous à la lumière d’une «histoire politique et culturelle partagée avec la France», comme vous l’écriviez dans la présentation de votre événement ?

On a été rattrapés par l’histoire. Le choix du terme était un choix par rapport à la saison. Bien sûr, il y avait cependant une certaine référence dans nos esprits au printemps arabe dans l’appellation, mais on n’est pas suffisamment fins stratèges pour deviner ce qui allait se passer en Algérie. Quoi qu’il en soit, c’était important d’évoquer ici le lien fort entre Roubaix et l’Algérie. Un lien qui rejoint celui entre la France et l’Algérie. C’est ce qui différencie l’exposition Guillaumet à Roubaix par rapport aux présentations précédentes à La Rochelle et Limoges – où on n’avait que l’expo Guillaumet -– ici nous l’avons élargie à l’Algérie. Nous voulions quelque chose de différent.

– Justement comment avez-vous pensé cet aller-retour avec l’Algérie pour tenir compte de la communauté algérienne présente dans le Nord ?

Dans le programme, on voulait un regard algérien sur la France ou un autre regard, algérien, sur l’Algérie. On cherchait l’artiste à inviter, lorsque nous avons été sollicités par un jeune photographe, Naeme Merabet, qui a passé toute son enfance à Roubaix et dont le travail est consacré à l’Algérie et ses passages de Roubaix à Médéa dont il est originaire.

– La restauration de «La famine» est un bel exemple de coopération culturelle avec l’Algérie. Est-ce que cela a été facile de mener ce projet à terme ?

Ce qui a été difficile au début c’est de retrouver le tableau. La commissaire, Marie Gautheron, a été à la recherche de cette œuvre qui, au-delà de ce qu’il représente aujourd’hui sur le partenariat avec l’Algérie, est un tableau fondamental de la peinture du XIXe siècle. Pour la commissaire, c’était très important de l’avoir. Elle a remonté sa piste pour le découvrir dans les réserves du musée Cirta à Constantine, après plusieurs déplacements en Algérie. Il a fallu une très importante restauration pour pouvoir le présenter après une demande de participation publique.

– L’opération de transfert du tableau vers la France a-t-elle été facile avec les autorités algériennes ?

Ce n’est pas une demande de prêt classique car il fallait restaurer le tableau. Il y avait peut-être la gêne pour le musée Cirta, en raison de l’état dans lequel se trouvait le tableau, mais il y a en France des tableaux tellement décriés du XIXe qui ont subi les mêmes dommages sinon plus. Après, c’est aussi, parfois, la difficulté qu’ont les musées français à obtenir des renseignements sur des œuvres conservées dans les collections publiques algériennes pour lesquelles on n’a pas toujours de réponses. Ce qui est sûr, c’est qu’on n’a pas eu de difficulté pour le tableau de Guillaumet. Il appartient à ce jour au musée d’Alger auquel la veuve de Guillaumet l’avait offert.

– A propos de Guillaumet, peut-on parler d’une œuvre de peintre-reporter sur la délicate période coloniale ?

On ne se promène pas comme on veut à cette époque-là des années 1860 et 1880 en Algérie. Guillaumet suit l’armée, mais il produit une peinture qui, malgré son intimité du voyage avec les troupes d’occupation, ne les fait jamais apparaître. Il n’est pas un reporter complaisant de l’avancée de l’armée coloniale en Algérie. Son sujet reste plutôt l’Algérie éternelle, sauf quelques exemples comme La famine en Algérie, sujet directement lié à l’actualité d’alors. Une peinture très décalée par rapport aux artistes officiels de la conquête.

– Guillaumet fait-il donc figure à part dans les créations d’autres peintres orientalistes ?

Il est chronologiquement entre les thuriféraires de la conquête, comme Horace Vernet, et les chantres d’une Algérie carte postale, comme Etienne Dinet, par exemple. C’est un peintre naturaliste qui, au lieu de chercher les sujets dans la campagne française, les trouve dans ses voyages en Algérie. Il est fasciné par le désert, à l’époque complètement nouveau pour les artistes. Il va peu à peu entrer dans un rapport intime avec la population algérienne. Il sera le premier à aller dans des intérieurs populaires. Il a une place très particulière.

La représentation de la femme est chez lui au centre actif de la vie familiale. Elle n’apparaît pas du tout comme les peintres orientalistes la peignent pour leur clientèle. Il se place dans la suite de Fromentin comme un amoureux de l’Algérie, sans la distance aristocratique. Chez Guillaumet, il y a un regard proche du peuple dans sa diversité, même de bas niveau social.


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