Tentative d’arrestation à la fac de droit d’Alger

Les étudiants en colère



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Les campus universitaires de la capitale sont depuis hier en ébullition. Trois agents en civil, présentés comme étant des policiers de la Brigade de recherche et d’investigation (BRI), ont fait irruption dans l’amphi 205 de la faculté de droit à Saïd Hamdine, où se tenait une réunion d’étudiants, pour procéder à une interpellation.

Scandalisés par cet affront, les jeunes étudiants ont encerclé les agents, les empêchant d’emmener leur camarade. «Nous étions en réunion lorsque deux agents en civil ont rejoint un troisième qui était présent dans l’amphi.

Ils ont demandé à un des étudiants, faisant partie de l’organisation, de les suivre, emportant avec eux la feuille de présence des participants. Pour nous, il fallait coûte que coûte ne pas laisser notre camarade entre leurs mains. Nous leur avons bloqué la sortie.

Certaines de nos camarades hurlaient pour que les étudiants qui étaient dans d’autres salles nous rejoignent. En quelques secondes, des centaines d’étudiants nous ont rejoints.

Ce qui a poussé les trois agents à lâcher notre camarade et à partir en courant, poussant violemment une étudiante sur leur passage, la blessant au bras», raconte une étudiante qui était sur place. Et de préciser que les trois véhicules, des 4×4 noirs, à bord desquels les policiers (ou les éléments d’un autre service de sécurité) sont venus, étaient stationnés dans l’enceinte de l’université.

D’autres témoignages évoquent l’arrestation de trois étudiants, mais nous n’avons pas pu vérifier la véracité de ces propos. De nombreuses vidéos enregistrées par des étudiants et diffusées sur les réseaux sociaux montrent les agents en question au moment où ils quittaient l’université à bord de leurs véhicules poursuivis par une cohorte d’étudiants qui criaient «Dégage».

Très en colère, les jeunes se sont retournés contre le recteur de la faculté, lui reprochant d’«avoir permis la violation de la franchise universitaire».

Quelques minutes après, de nombreux policiers sont venus ramener le calme dans le campus. Aucune information n’a pu être obtenue sur l’identité des agents en civil ni sur la partie qui les a instruits de procéder à une interpellation dans l’enceinte, à l’intérieur de l’université. En tout état de cause, cette bavure a provoqué une colère indescriptible dans certains campus d’Alger.

A la Faculté centrale, les étudiants ont tout de suite tenu un rassemblement pour dénoncer «la violation de la franchise universitaire» et en scandant durant près d’une heure : «Nahnou talaba maranach irhabiyine» (nous sommes des étudiants, pas des terroristes), alors que dans plusieurs autres universités, des réunions étaient tenues pour sortir avec des actions de protestation contre cette «répression».

Celle-ci intervient après les graves témoignages de trois jeunes manifestantes arrêtées samedi dernier à la Grande-Poste, sur ce qu’elles ont enduré dans un commissariat de Baraki, où elles avaient été conduites.

Mais face aux récits choquants de tortures morales, un laconique communiqué de la Sûreté de wilaya d’Alger apporte un démenti, sans pour autant expliquer ce que faisaient les jeunes filles au commissariat de Baraki, qui relève du parquet d’El Harrach, alors qu’elles ont été interpellées à la Grande-Poste, secteur qui dépend du tribunal de Sidi M’hamed.

Plus grave encore est cette pratique, devenue courante, de transférer les manifestants arrêtés vers des commissariats situés à la périphérie de la capitale et de les relâcher, dans la nuit, à des kilomètres de leurs domiciles.

Ce sont de graves dérives face auxquelles la justice est restée silencieuse jusque-là. La violation de la franchise universitaire par des agents de la BRI ou de tout autre service de sécurité, fut-il de la Direction de la sécurité intérieure, est une dérive qui risque de provoquer l’irréparable, si l’autorité judiciaire ne réagit pas.


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