Gaid Salah

l'armée ouverte au dialogue



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Après avoir soutenu fortement la période de transition qui devrait déboucher sur la tenue d'une présidentielle le 4 juillet, le chef de l'état-major, Ahmed Gaïd Salah a ouvert ce mercredi une fenêtre à une autre alternative à travers une solution politique via des « propositions constructives » et des « initiatives utiles ».
« Nous réitérons également que l'Armée nationale populaire demeurera engagée à préserver les nombreux acquis et réalisations de la nation, ainsi que l'accompagnement du peuple et de ses institutions à travers la mise en œuvre de solutions possibles », tout en approuvant « toute proposition constructive et initiative utile » allant dans le sens du « dénouement de la crise et menant le pays vers la paix », a-t-il dit.
Or le peuple, depuis le 22 février, jour de la première marche, exige le départ de tous les hommes qui symbolisent le système déchu et leur remplacement par des hommes propres et intègres devant conduire une période de transition qui déboucherait sur une élection présidentielle honnête et transparente. C'est la satisfaction de cette exigence suprême du peuple qui peut permettre le dénouement de cette « crise » pour « mener le pays vers la paix » dont parle le chef d'état-major de l'ANP, qui est aujourd'hui au centre des enjeux. Ces deux approches diamétralement opposées vont-elles déboucher sur un consensus afin de dépasser cette crise qui dure ? Depuis quelques semaines, les deux parties butent sur les voies et moyens à mettre en œuvre, chacune s'appuyant sur une légitimité -l'une constitutionnelle et l'autre révolutionnaire- le tout dans un langage de sourds préjudiciable à une sortie de crise. Le patron de la Grande muette, qui se donne désormais l'apparence d'un président, donne des ordres même à la justice, menace et avertit tous ceux qui tentent de saborder la démarche actuelle.
Le peuple, lui, sort chaque vendredi dire ses vérités et formuler ses exigences à demi acceptées, et maintient ses revendications, celles de la première marche, à savoir le départ définitif du système qui a fondé la première République et le passage à la seconde avec tout son lot de libertés et de démocratie.
Si Gaid Salah a montré, lors de pour discours, qu'il est disposé à écouter le peuple afin de « préserver les liens de communication » avec lui, un effort supplémentaire est demandé de part et d'autre. Chacun doit faire des concessions et aboutir au final à une sorte de feuille de route partagée.
Le chef de l'état-major a bien mis en avant les articles 7 et 8 de la Constitution pour ensuite les supprimer volontairement de son discours.
De là à dire qu'il va joindre l'acte à la parole, c'est un pas que d'aucuns hésitent à franchir tant la promesse qu'il a faite de rendre la souveraineté au peuple via les articles 7 et 8 reste encore un vœu pieux : « Notre pays, qui a transcendé les différentes épreuves et crises qui l'ont secoué tout au long de son histoire, sortira indéniablement plus fort et plus solide de sa crise actuelle et ce, grâce à la cohésion parfaite, au lien affectif profond et à la confiance exceptionnelle entre le peuple et son armée, qui porte l'intérêt de la nation au-dessus de toute considération » a-t-il répété.
Si Ahmed Gaïd Salah a assuré à plusieurs reprises que la Grande muette « n'interviendra plus dans la vie politique », il a réagi plusieurs fois à la situation politique dans laquelle se trouve le pays. Serait-ce, cette fois-ci, l'annonce d'une nouvelle approche plus pragmatique et résolument réaliste de la part de l'homme fort du pays, qui veut mette les pieds dans le plat pour la recherche d'une vraie solution avec l'ensemble de la classe politique ?
La dixième marche de demain sera peut-être celle qui scellera définitivement le lien entre le peuple et son armée républicaine. Galvanisés par les concessions obtenues depuis le début des manifestations pacifiques, les Algériens s'apprêtent à descendre massivement dans la rue du pour ce dixième vendredi d'affilée. Objectif : ne rien lâcher et obtenir finalement le départ du système et la mise en place d'une véritable transition démocratique.
Hocine Adryen


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