Décryptage. Pourquoi les décideurs de l’armée algérienne peinent à comprendre les manifestants algériens



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Le mouvement populaire du 22 février indique que c’est la 1er fois depuis l’indépendance que l’armée a un problème politique avec l’ensemble des Algériens. Auparavant, elle s’était arrogée le monopole de faire de la politique au nom des Algériens soit en défendant la souveraineté nationale contre les étrangers, soit en réprimant des courants idéologiques opposés au régime. Cette fois-ci, c’est l’ensemble de la société qui pose un problème nouveau pour le commandement militaire : la place de l’armée dans la hiérarchie de l’autorité de l’Etat.

Les officiers de l’EM sont déboussolés et ne s’attendaient pas à la maturité d’un peuple qui demande à l’armée d’être fidèle au mouvement national dont elle est issue et d’assumer son caractère National, Populaire et Républicain.

Les mots d’ordre de ce 14èm vendredi visent directement le général Gaid Salah en sa qualité de Chef d’Etat-Major. Ce n’est pas la personne qui est visée ; les Algériens savent que c’est un ancien moudjahed et qu’à ce titre, il est respectable. Mais il n’empêche qu’il est accusé de khawana (trahison) par les manifestants. En refusant de se mettre sous les ordres d’une autorité civile émanant de la volonté populaire, il trahit le serment des chouhadas morts pour l’indépendance et le caractère républicain de l’armée. Les martyrs sont morts pour la création d’une armée qui défend la nation et non un clan (‘issaba) ou une aristocratie.

L’EM se trouve face à un problème politique qu’il ne peut pas résoudre par la répression car l’idéologie républicaine est aussi portée par les officiers et hommes de troupes. Au nom de qui parle Gaid Salah ? Au nom des Algériens ? Ils ne l’ont pas mandaté. De surcroît, il est officiellement Vice-Ministre d’un ministre de la défense qui a démissionné. Normalement, il devrait démissionner puisque son ministre hiérarchique a démissionné sous la pression populaire. Il parle à l’évidence en sa qualité de chef d’EM.

Dans toute armée, cette fonction est occupée par le soldat le plus compétent en matière militaire, le plus respecté et le plus décoré. Il n’y a aucune raison de mettre en doute ces qualités au général de corps d’armée Gaid Salah. Surtout que la discipline et l’obéissance à l’autorité hiérarchique dans l’armée est vitale à la stabilité de la nation. Mais le pays est en crise et la hiérarchie militaire doit tenir compte de l’état d’esprit des officiers supérieurs, subalternes et des HDT. L’EM devrait faire un sondage anonyme (avec un échantillon de 1000 militaires tous grades confondus) sur leurs opinions sur les revendications du mouvement populaire. Si une majorité de militaires est favorable à ces revendications, l’EM devra tirer la conséquence et engager un processus de désignation consensuelle d’une présidence collégiale provisoire qui aura autorité sur l’administration de l’Etat, y compris l’armée, pour préparer les élections présidentielle et législative.

Le général algérien doit apprendre que ce n’est pas une honte d’être sous l’autorité d’un civil, si ce civil est élu par le suffrage populaire.

En étant sous l’autorité d’un président élu, le général ne sert pas un individu mais la nation. Un proverbe de la sagesse populaire de notre terroir dit : khaddam erjal sidhoum. Mon général, en vous soumettant à la volonté populaire, vous devenez à nos yeux un seigneur.

Par Lahouari Addi, professeur de sociologie à l’Institut d’Études Politiques de Lyon et chercheur à Triangle, laboratoire du CNRS. Ce texte a été préalablement sur la page Facebook de cet auteur

 

 


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