Elaine Mokhtefi, témoin de l’Algérie postindépendance



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Journaliste américaine, Elaine Mokhtefi née Klein est un témoin perspicace de la Guerre de Libération nationale et de la période charnière qui a suivi l’indépendance. Elle raconte, en tant qu’actrice, une des périodes fastes de l’Algérie postindépendance, dans un ouvrage récemment paru en français aux éditions La Fabrique : Alger, capitale de la Révolution : de Fanon aux Blacks Panthers.

Ce livre-mémoire de 279 pages relate une séquence de l’histoire récente de l’Algérie, qui suscite l’intérêt de beaucoup de chercheurs, historiens et militants des mouvements révolutionnaires. D’abord la trajectoire d’une jeune militante américaine qui découvre la cause algérienne dans son processus de décolonisation, ensuite l’épouse d’un moudjahid qui participe à l’édification de la jeune République algérienne.

C’est à partir de Paris que cette New-yorkaise découvre «une sous-classe et une sous-culture de travailleurs algériens immigrés (qui) engageaient le pays dans une bataille existentielle pour la reconnaissance et la liberté».

Les manifestations des travailleurs du 1er mai 1952 à Paris ont suscité son intérêt : elle est «littéralement percutée par la réalité» des Algériens qui défilaient sans lancer de slogans ni porter des drapeaux ou de banderoles parce que le syndicat CGT avait «voulu empêcher toute réclamation d’indépendance d’Algérie». Quelques mois après, elle a été témoin des balles assassines contre les Algériens, lors de la manifestation du 14 juillet 1953 à Paris, qui revendiquaient l’indépendance de leur pays. La police française avait tué sept d’entre eux et blessés des centaines.

Son militantisme pour les causes justes l’a plongé dans le contexte des turbulences vécues à l’époque par le continent africain, dont elle voyait que la décolonisation était «une des questions primordiales» de l’après-guerre 1939-1945.

Mais le plus attrayant du récit de cette militante − issue d’une famille juive de la classe ouvrière américaine que le destin fait qu’elle se marie avec le moudjahid et écrivain Omar Mokhtefi, décédé en 2015 − est la période 1962-1974 où elle a vécu en Algérie.

Cette femme, qui s’était engagée pour l’indépendance de l’Algérie, a rejoint Alger en octobre 1962, en même temps que les représentants des mouvements révolutionnaires, notamment africains. Après avoir travaillé quelques mois à l’Office national de tourisme  (ONAT), elle rejoint la présidence de la jeune République algérienne et travaille au bureau de presse et d’information, sous la responsabilité de Cherif Guellal, qui deviendra six mois après ambassadeur à Washington.

Elaine témoigne de l’engouement des étrangers, qui ont soutenu la Guerre de libération, à aider cette Algérie indépendante : «Je n’étais pas seule. Plusieurs milliers d’étrangers, partisans de l’Algérie indépendante, étaient arrivés de France, de Tunisie, du Maroc dès les premiers mois de l’indépendance…» Elle raconte également qu’elle a été affectée en 1964 au secrétariat d’Etat au niveau du palais du gouvernement après la venue d’un nouveau directeur du cabinet présidentiel, mais elle a préféré rejoindre l’agence de presse APS, pour travailler au desk anglais, puis en 1968 elle est entrée à la Radio-Télévision algérienne (RTA) où elle dirigeait trois émissions consacrées aux événements nationaux et internationaux.

Son récit est une mine d’or sur une période où il y avait en Algérie un bouillonnement dans tous les secteurs. Les responsables algériens de l’époque, avec l’aide des compétences étrangères, étaient les architectes de l’Etat moderne algérien. Ses rencontres avec les grandes figures de l’époque, comme Ahmed Ben Bella, Fidel Castro, Eldridge Cleaver des Black Panthers, Mohamed Sahnoun, Mohamed Bedjaoui, Mohamed Seddik Benyahia, Houari Boumediène, les Chaulet, Amilcar Cabral, Frantz Fanon… la projettent dans une intense activité, dans le tourbillon des événements nationaux et internationaux, particulièrement tiers-mondistes.

Le récit d’Elaine Mokhtefi de ce vécu algérien témoigne de l’effervescence des luttes anticoloniales pour un nouvel ordre international plus juste, offrant aux peuples les plus démunis une vie meilleure.

R. C.

 


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