Alternative démocratique

Le sens de l’histoire



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La révolution démocratique en cours dans le pays est à la croisée des chemins. Si elle garde intacte toute sa vigueur, elle traverse un moment de doute après quatre mois d’insurrection générale sans répit.

L’incroyable énergie politique déployée par des millions d’Algériens dans une intelligence collective inédite fait face à un déni implacable. Les héritiers du régime Bouteflika freinent des quatre fers.

Ils opposent une résistance pour le moins incompréhensible. Alors que l’élan populaire parti depuis les gorges de Kherrata et les monts de Khenchela ouvre le champ des possibles, le pouvoir rend de plus en plus impossible l’issue salutaire du processus révolutionnaire en cours. Les portes de sortie sont verrouillées à double tour.

C’est dans ce contexte chargé d’incertitudes que l’opposition démocratique s’organise, élabore et s’emploie à donner un prolongement politique au mouvement populaire. La rencontre des partis et organisations de la société civile tenue au siège du RCD, en présence de figures militantes de premier plan, ouvre une brèche d’espoir dans le mûr d’impasse politique dressé par le pouvoir.

Sans rompre le lien avec les partis d’autres obédiences, l’initiative du courant progressiste ouverte aux diverses sensibilités dans l’opinion s’affaire à donner du contenu à la révolte populaire. Mais surtout, elle se donne l’historique mission d’ouvrir des perspectives sérieuses pour la révolution démocratique.

En s’adossant au puissant mouvement populaire, la classe politique, qui a longtemps ferraillé contre le système, notamment dans sa version bouteflikienne, reprend l’initiative, impose les termes du débat et revient au centre de la bataille historique que livrent les Algériens pour donner corps à l’alternative démocratique à construire. Et il était temps.

Le politique reprend son droit et cela a donné naissance à un pacte politique à la hauteur de l’exigence du moment que traverse le pays. Un texte de clarification politique.
Un rappel nécessaire des fondamentaux, accompagné de conditionnalité politique devant présider à une transition politique véritable et de l’affirmation des préalables démocratiques sans lesquels le changement fortement revendiqué n’aurait pas de sens.

Il ne s’agit pas de vouloir renverser le système autoritaire pour obtenir forcément le changement vers un monde meilleur. Combien de révolutions joyeuses ont tourné au cauchemar despotique.

La défense des principes de liberté dans toutes ses déclinaisons n’est pas pour prendre en otage la révolution, mais elle donne un sens à la transformation du système de gouvernance. Elle est la raison même de la révolution démocratique qui soulève les Algériens. La résolution politique adoptée hier à l’issue de la réunion des partis et organisations de la société civile peut fonctionner comme une charte inclusive dans laquelle se retrouvera tout citoyen aspirant à un monde de liberté.

A l’opposé de l’élection présidentielle que veut imposer le chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah comme unique et exclusive porte de sortie de crise, le conclave des organisations politiques et de la société civile propose une démarche intégrale en mesure de conduire vers une véritable alternative démocratique.

Elle entre en résonance avec les aspirations populaires exprimées dans les interminables processions pour la liberté. Il n’est pas exagéré d’affirmer que le «pacte politique pour l’alternative démocratique» s’inscrit dans le sens de l’histoire qui s’écrit dans le pays. Il va sans dire que la tâche de l’édification de l’œuvre démocratique reste colossale.

Si le plus dur a été fait par la déterminante lutte des Algériens en se débarrassant de l’hypothétique 5e mandat de Bouteflika et le démantèlement de quelques figures de son régime. Il reste le plus important à réaliser dans cette entreprise historique.

Empêcher le détournement de la révolution qui est au milieu du gué, menacée par la contre-révolution qui est à l’œuvre. Les forces de résistance ne cessent d’injecter des éléments de la division en réactivant les vieux démons qui, pour l’heure, demeurent sans impact sérieux sur le cours des événements en raison de la capacité du «peuple du vendredi» à désamorcer les bombes, à déjouer les manœuvres et à dépasser les faux clivages.

Cependant, les signataires du «Pacte politique» sont face à une responsabilité historique. Celle de préserver l’insurrection citoyenne des menaces qui pèsent sur elle, de lui donner un prolongement politique naturel et d’agréger d’autres forces pour mieux la «bétonner».

Ils auront la lourde tâche d’assurer le succès de la transition, mais surtout d’échafauder la meilleure méthode de sa mise en marche. L’œuvre recommande l’intelligence, sollicite l’imaginaire et appelle le génie. Il y a de tout cela chez les hommes et les femmes en insurrection dont font partie pleinement les nombreux leaders de l’opposition regroupés hier autour d’un pacte véritablement patriotique.


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