Dévaluation du dinar

L’autre option à risque du gouvernement



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L’économie nationale a besoin en urgence d’une batterie de réformes, qu’ en réalité, un gouvernement, appelé à gérer les affaires courantes dans le contexte de crise politique que vit le pays, ne peut pas mener.

Face à la fonte accélérée des réserves de change, que fera le gouvernement qui a exclu, pour le moment, le recours au financement non conventionnel et à l’endettement extérieur ? Même si le ministre des Finances, Mohamed Loukal – qui répondait le week-end dernier aux questions de l’agence officielle APS – n’avait pas écarté ces deux options sous conditions, d’autres sources de financement sont envisageables à court terme, selon l’économiste Smaïl Lalmas, dans un entretien accordé à Tout Sur l’Algérie : «Avec le gel de l’utilisation de la planche à billets et un épuisement des réserves de change, le seul recours qui reste au gouvernement c’est d’aller vers une baisse une nouvelle fois de la valeur du dinar pour essayer de compenser la balance de façon artificielle.»

Depuis la moitié de 2014, date du début de la chute des prix du pétrole, le recours à la dévaluation de la monnaie nationale a été important, selon Smaïl Lalmas, qui pense que la dévaluation «est la gymnastique préférée du gouvernement». Selon lui, «dès qu’il y a un problème de déficit, on va vers ce genre de mécanisme : baisser la valeur du dinar pour compenser de façon artificielle le déficit de la balance».

Dans une économie qui fonctionne normalement, la dévaluation du dinar aurait pu représenter une solution conjoncturelle, le temps de procéder à certains réglages. C’est un levier comme un autre – comme le recours à l’endettement extérieur ou à la planche à billets – sur lequel peut embrayer n’importe quel gouvernement appelé à penser des issues à la crise économique.

Mais est-on dans ce cas ? L’optimisme du ministre des Finances est-il fondé, lui qui parle de l’existence d’une marge de manœuvre malgré les tensions sur la trésorerie ?

Selon l’expert international Abderrahmane Mebtoul, dans une tribune transmise à El Watan, «en cas de baisse drastique des réserves de change à 10/12 milliards de dollars, qui tiennent la cotation du dinar à plus de 70%, la Banque d’Algérie sera contrainte de dévaluer le dinar officiel à environ 200/220 DA pour un euro, avec une envolée du cours sur le marché parallèle qui fluctuera en fonction du taux d’inflation entre 300/400 DA pour un euro». «Cela accélérera, écrit-il, le processus inflationniste.» En résultera, selon lui, «un très fort ralentissement de la croissance dès 2020 avec l’augmentation du taux de chômage.»

Autre conséquence, explique l’expert international : la persistance des déficits budgétaires, notamment «les déficits externes qui vont éliminer progressivement toutes les marges de manœuvre dont dispose l’Algérie».

L’économie nationale a, en fait, besoin en urgence d’une batterie de réformes, qu’ en réalité, un gouvernement, appelé à gérer les affaires courantes dans le contexte de crise politique que vit le pays, ne peut pas mener. Abderrahmane Mebtoul, qui met en garde contre un pic inflationniste dès 2020, déconseille le recours à la planche à billets et appelle surtout à résoudre vite la crise politique «pour éviter l’épuisement des réserves de change».

Il faut des réformes de fond que seul un régime politique légitime peut mener, s’accordent à dire les économistes. Car les réformes dont a besoin l’économie nationale ont assurément un coût social que seule la légitimité politique peut faire passer. Un Exécutif qui fait l’objet d’un rejet massif des Algériens ne peut pas le faire.


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