«Quelles priorités économiques pour l’Algérie à l’horizon 2022 ?»



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Le Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (CARE) qui a initié depuis plusieurs années un cycle de conférences sur la nécessaire impulsion économique algérienne, a orienté hier, au vu de la crise politique actuelle, le débat sur «l’urgence» d’une sortie de crise à travers l’«Etablissement d’une feuille de route à l’horizon 2022».

Des solutions à envisager, selon les différents experts intervenant à la rencontre abritée hier par l’hôtel Sofitel à Alger, dans le cadre global d’une sortie de crise politique.

En guise d’introduction à la conférence, le Cercle de réflexion a alerté sur «une situation critique exigeant des mesures d’urgence, dans un contexte de manque dramatique de visibilité sur les perspectives économiques et sociales pour les années à venir».

Dans une tentative de cibler les solutions idoines, le CARE a orienté la réflexion sur plusieurs volets économiques clé, dont notamment le climat des affaires et la notion de bonne gouvernance.

Il avait en amont planté le décor en soulignant que «la dynamique révolutionnaire enclenchée par le mouvement populaire en février 2019 aboutit à un consensus général sur la nécessité du passage à un régime démocratique et à un cadre de gouvernance politique, au service du citoyen et du développement du pays».

Il a souligne ensuite que sur le plan économique, «la dégradation rapide des comptes, le marasme général vécu par les acteurs et la stagnation économique sont un sujet d’inquiétude grandissante».

Abordant la question du climat des affaires, en liaison avec la relance des investissements en Algérie, Farid Yaïci, professeur à l’université de Béjaïa, a noté que les autorités algériennes ont toujours adopté «une attitude ambivalente» vis-à-vis du classement de la Banque mondiale en matière de «doing business».

Ainsi, a-t-il indiqué, «elles le rejettent dès lors qu’il est défavorable à l’économie algérienne, mais installent paradoxalement un comité dédié à l’amélioration du climat des affaires en Algérie».

Une instance devenue rapidement «inopérante», selon lui, au vu «des contradictions multiples, de la complexité des procédures administratives et de la multiplicité des intervenants et des décideurs qui, en fin de compte, ont empêché toute avancée» dans le sens de l’amélioration du climat des affaires.

Pour sa part, l’économiste Abdelmadjid Messaoudi qui a abordé la question de «La diversification industrielle en tant que levier de la diversification économique», a notamment ciblé la mise en œuvre urgente de la réforme des finances publiques.

Selon lui, « la réforme et l’informatisation des finances publiques autorise une meilleure transparence, une maîtrise et un contrôle de la dépense publique, réduisant les risques de dérapage, et mettant en évidence les possibilités de rationalisation grâce au benchmarking systématique de ces politiques, notamment en matière d’aide et de subvention publiques».

Il préconise également de «réviser les lois et dispositifs décidés centralement, qui limitent la liberté d’initiative des entreprises, notamment la LFC 2009». Pour l’expert, il faut «leur substituer des engagements et mécanismes de marché qui préservent les intérêts généraux communs de l’économie».

Crise économique sur fond de crise de légitimité

Abordant pour sa part le thème de «La crise économique sur fond de crise de légitimité», , expert en ingénierie financière et stratégie de développement, a notamment affirmé que «la baisse drastique des revenus extérieurs de l’Etat a fragilisé les fondements de notre économie dirigée». Une situation qu’aggrave  «la crise de légitimité de gouvernance politique».

De ce fait, explique Farid Bourenani, «il existe des dangers imminents menaçant la survie d’entreprises fortement endettées, et la mise en péril des emplois». Il estime que dans ce contexte, «les secteurs à prioriser sont ceux qui contribuent à la sécurité alimentaire, qui permettront d’économiser réellement des devises ou de permettre d’en générer».

Pour l’expert, il faut aussi que «les fonds d’investissement publics, privés, sectoriels et géographiques soient fortement encouragés ainsi que les partenariats public-privé». Il préconise par ailleurs de «tendre graduellement vers une convertibilité du dinar».

Abordant le volet consacré à «La gouvernance économique et l’éthique des affaires», Hind Benmiloud, avocate, spécialiste du droit des affaires, a notamment insisté sur la bonne gouvernance au sein des entreprises, tout en faisant le lien avec la situation de blocage de certaines entités dont les gestionnaires ont été incarcérés paralysant totalement la marche de l’entreprise et mettant en péril ses employés et ses investissements.

L’experte juridique cite un certain nombre d’incohérences de gestion au sein des entreprises, qu’elles soient publiques ou privées, et insiste sur la nécessite de faire du «droit un le pilier de la gestion de l’entreprise».

Pour l’intervenante, il faut impérativement que les entreprises respectent un «code d’éthique» et des règles de gestion conformes à la loi pour se prémunir de tous les aléas auxquels sont confrontées certaines entreprises actuellement.

Pour ce qui est de la notion de bonne gouvernance dans son acception générale, le professeur Mohamed Cherif Belmihoub a avancé des pistes pour une reconstruction économique, à travers notamment «un processus de stabilisation à court terme, puis des réformes structurelles à moyen terme avant de tendre vers une économie diversifiée et compétitive» dans un délai de 5 à 10 ans.

De son côté, le professeur Mohamed Bouchakou a indiqué que «la bonne gouvernance est totale ou n’est pas». Pour la concrétiser, il faudrait notamment, selon l’expert, «la neutralité de l’administration, l’introduction systématique de la e-gouvernace, la mise en place d’une médiation de la République et l’institutionnalisation du partenariat public-privé et du dialogue social».


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