Saïd Bouteflika refuse de témoigner



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Coup de tonnerre au troisième jour du procès dit de la bande « issaba ». Le volet lié au financement occulte de la campagne de Abdelaziz Bouteflika aura été riche en témoignages de la part des hommes d'affaires aujourd'hui incarcérés dans des affaires liées au montage automobile. Le frère du président déchu, Saïd Bouteflika, accusé par Ali Haddad, l'ancien patron du FCE, dans ce financement illégal, a comparu comme témoin à la barre au tribunal de Sidi M'Hamed (Alger), après avoir été demandé par le procureur de la République. Cette comparution n'a pas servi à grand-chose, puisque Saïd Bouteflika, arrivé en fin d'après-midi au tribunal, a refusé de répondre aux questions du juge, laissant sur leur faim les nombreux observateurs présents et l'opinion publique qui attendaient de sa part de nouvelles révélations.

Pour rappel, le juge du tribunal de Sidi M'hamed (Alger) a ordonné, hier, dans le cadre du procès d'anciens responsables et d'hommes d'affaires impliqués dans des affaires de corruption relatives à l'activité de montage automobile et de financement illégal de la dernière campagne électorale de l'ex-Président Abdelaziz Bouteflika, la levée de l'audience jusqu'à la comparution de Saïd Bouteflika.

Le procureur de la République a demandé la comparution de Saïd Bouteflika comme témoin dans l'affaire, car son nom a été cité plusieurs fois lors de ce procès.

L'homme d'affaires Ali Haddad, en détention provisoire, avait avoué, lors de son interrogatoire par le juge d'audience, avoir été chargé par Saïd Bouteflika de récupérer l'argent destiné au financement de la campagne électorale de son frère.

C'est ainsi que l'ex-patron des patrons algériens, Ali Haddad, homme d'affaires proche du président sortant Abdelaziz Bouteflika, a pointé, hier au 3e jour du procès de la « Issaba », un doigt accusateur sur le frère d'Abdelaziz Bouteflika, en l'occurrence Saïd Bouteflika.

L'ex-patron du FCE, qui a été arrêté le 29 mars dernier au poste frontalier d'Oum Tboul avec la Tunisie, a affirmé au président du pôle judiciaire de Sidi M'Hamed que « Saïd Bouteflika m'a chargé de récupérer 750 milliards de centimes qui se trouvaient au niveau de la direction de la campagne électorale de son frère Abdelaziz Bouteflika ».

Dans le même contexte, il a tenu à préciser que « 65 millions de dinars, soit 6,5 milliards de centimes, ont été déboursés dans la location de trois immeubles à Alger et que 7 millions de dinars ont été déboursés dans l'acquisition d'outils bureautiques ».

L'enfant d'Azzefoun, fondateur et PDG du Groupe ETRHB Haddad et ex-président du Forum des chefs d'entreprises du 27 novembre 2014 au 28 mars 2019, a été interrogé par rapport aux sommes faramineuses collectées pour faire réussir la campagne électorale de l'ancien président de la République en affirmant avoir contacté plusieurs hommes d'affaires.

Dans le même ordre, il a déclaré que l'homme d'affaires « Mazouz lui a remis un chèque d'un montant de 39 milliards de centimes ! ».

Ali Haddad, qui est classé par Forbes dans le top 5 des personnalités les plus riches d'Algérie, a pu, en un laps de temps relativement court, constituer une fortune colossale estimée à plusieurs milliards de dinars mais aussi en devises, et ce après avoir bénéficié de grandes facilités dans l'octroi de crédits bancaires. Il a reconnu avoir sollicité l'homme d'affaires Arbaoui Hassen de participer au financement de la campagne électorale de Bouteflika sur ordre de son frère

Saïd, condamné par le tribunal militaire de Blida à 15 ans de prison ferme.

Il a par ailleurs tenu à préciser que « Arbaoui a remis un chèque de 20 milliards de centimes et 20 véhicules luxueux à la direction de campagne électorale du président déchu ».

Il a clamé haut et fort en direction du juge : « Je n'étais pas responsable ! »

Et le juge de répliquer : « Je ne vous ai pas dit que vous étiez responsable de la situation ! ».

Appelés à la barre pour donner leur version des faits, les hommes d'affaires tels que Achaïbou et Omar Rebrab ont dressé un dur réquisitoire contre le système qui régnait à l'époque et à sa tête l'ex-ministre de l'Industrie Bouchouareb, qui demeure en état de fuite et fait l'objet d'un mandat d'arrêt international.

Ils ont estimé qu'ils ont été évincés de toutes les transactions liées à l'automobile alors qu'ils répondaient aux normes.

A titre d'exemple, l'homme d'affaires Achaïbou a par ailleurs affirmé au juge d'audience que « l'ex-ministre de l'Industrie était ingérable ! Il ne répondait pas à mes correspondances et lettres et refusait de me recevoir ! »

Et d'ajouter : « Vous savez monsieur le président, je suis content de les voir aujourd'hui devant le tribunal. Ils doivent s'expliquer ! ».

Il a en outre tenu à souligner que « des cadres et des fonctionnaires de la tutelle à l'instar de Tira et la directrice centrale du ministère de l'Industrie Hassina Makraoui étaient de connivence et choisissaient les concessionnaires qui arrangeaient leurs affaires ! ».

Achaïbou a par ailleurs indiqué qu'il a « investi des sommes colossales pour l'ouverture d'une usine et a construit un immense immeuble à Bab Ezzouar pour l'administration de Ford. En fin de compte, son dossier a été rejeté par la commission du ministère de tutelle sous prétexte que l'offre de Tahkout était plus intéressante et plus importante ! ». Il a en outre déclaré : « Je n'ai jamais eu des problèmes d'ordre fiscal ».

Achaïbou a enfin déclaré que « j'ai investi 370 millions de dinars pour l'acquisition de 180 véhicules luxueux pour l'ex-système et j'ai payé 1,5 milliard de dinars pour la construction de 300 000 véhicules ! ».

Le président a par ailleurs entendu un homme d'affaires turc, Nihad Orlo, investisseur dans le domaine de l'automobile, qui a tenu à préciser au magistrat en charge de ce lourd dossier : « J'ai investi pas moins de 95 millions de dollars en Algérie. Je possède les marques de JMC, JAC et DFSK… ».


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