Régionalisme et révisionnisme

ces tares ancrées dans la mentalité politique



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Par Dr Arab Kennouche – Depuis que la parole s’est libérée anarchiquement en Algérie, allant jusqu’à provoquer le viol de la conscience historique de la nation, l’Etat semble dépassé par ces attaques verbales qui fusent de toute part sur l’identité, la religion et, désormais, la Guerre de libération nationale. Le discours nationaliste et revendicateur du peuple algérien, incarné par le Front de libération nationale historique, est l’objet aujourd’hui d’une remise en cause en bonne et due forme dans le discours latent de nombreux medias actionnés par des officines politiques très proches des cercles du pouvoir de l’époque Bouteflika, du patrimoine de la Révolution de Novembre 1954.

Ces tirs croisés visent essentiellement à diffuser une nouvelle idéologie assimilationniste, collaboratrice, contre-révolutionnaire, grâce à l’action conjointe de certains leviers politiques, de médias inféodés à l’étranger, du Proche-Orient, de l’Europe occidentale, qui n’est pas sans rappeler la politique harkie de la France au plus fort de la Guerre d’Algérie. Mais cette nouvelle harkisation des esprits n’aurait jamais vu le jour si le pouvoir politique s’était prémuni de telles dérives antipatriotiques, savamment entretenues de l’extérieur, par l’élaboration d’un système de répression sans faille des atteintes sourdes et sournoises aux fondements de l’Etat algérien.

En Algérie, le régionalisme est devenu une tare bien profonde ancrée dans la mentalité politique des plus hauts personnages de l’Etat. On se souvient encore de la réhabilitation de Messali Hadj par Bouteflika comme une transgression incompréhensible par le peuple des fondements idéologiques de la Révolution nationale. C’est, au fond, une lecture purement régionaliste et révisionniste de Bouteflika qui le conduisit à réhabiliter un personnage qui fut pourtant considéré comme un ennemi du combat libérateur, car il était aisé, autrement que par la figure largement controversée de Messali, pour l’ex-président de la République, de rappeler à la mémoire de tous les Algériens les faits d’armes glorieux des combattants de la région de Tlemcen, des monts Traras, inconnus du grand public algérien.

Nous pourrions citer de nombreux autres exemples par lesquels l’alliage du régionalisme et du révisionnisme eut des effets pervers dans l’Algérie politique de ces dernières années. Ce sont ces deux ferments qui ont empêché de faire la part des choses entre la réalité historique d’une indépendance obtenue de haute lutte et une réécriture programmée de l’histoire en vue de modifier le cours des événements adapté au nouvel agenda occidental du Proche et Moyen-Orient. Un autre fameux exemple consiste à prendre en grippe les citoyens de la Kabylie, non pour ce qu’ils sont, une partie de l’Algérie, mais pour ce qu’ils représentent, le congrès de la Soummam du 20 août 1956. On s’attaque ouvertement à Abane Ramdane, omettant de souligner que Larbi Ben M’hidi – et bien d’autres encore qui n’étaient pas issus de cette région – était lui-même le président de ce congrès et venait des Aurès.

Le révisionnisme sélectif largement entretenu par les médias algériens de Bouteflika utilisa le même procédé de confusion des mémoires en créant dans l’esprit du peuple une association perverse entre la Kabylie et le combat national, et même la kabylité et la Révolution nationale. Jamais au grand jamais il n’a été donné à penser à la nation que le FLN a formé le creuset le plus antirégionaliste dans l’histoire de l’Afrique du Nord, que le FLN s’est évertué dès le début de l’aventure anticoloniale à éliminer tous les discours de division qui ont cours aujourd’hui en Algérie ; bref, que le FLN est une véritable marque de fabrique contre le régionalisme, la division ethnique et le révisionnisme politique.

Qui peut aujourd’hui nier que ce sont des hommes de Constantine, Batna, Biskra, Mila qui sont allés verser leur sang et diriger la lutte en Oranie ? Pourquoi les hauts faits d’arme des monts de Tlemcen sont occultés à la mémoire des citoyens de la Kabylie et des autres régions d’Algérie ? Pourquoi, aujourd’hui dans les médias, le concept de Révolution nationale est remis en cause insidieusement par l’incompétence voire l’ignorance d’acteurs médiatisés empreints de localisation géographique excessive de la Révolution ? Pourquoi le peuple algérien ignore-t-il les grandes révoltes des hauts plateaux de Djelfa, Biskra, M’sila qui, au cours du XIXe siècle, ont eu un impact fondamental, par leurs convulsions répétitives et nombreuses, sur la Révolution de 1954 ? Pourquoi l’Etat est-il absent de la promotion d’un discours institutionnel sur la nature véritablement nationale de la Révolution algérienne, prise dans un rapport espace-temps et non plus, cette fois-ci, par le bout d’une lorgnette révisionniste et anti-algérienne ?

Il est, en effet, grand temps de constitutionnaliser une instance souveraine de protection et de sauvegarde des acquis de la Révolution algérienne, visant à écarter le risque de promotion de personnes hostiles à ses idéaux d’unité de la nation qui, chaque jour, prolifèrent en pontifiant sur l’identité des Algériens, leur religion et leur histoire politique. Une telle instance, dans un pays comme l’Algérie, ne doit pas être uniquement un organe consultatif laissé à la portée discrétionnaire du président de la République, mais doit se placer au-dessus de tous les organes électifs du pouvoir, de sorte qu’aucune atteinte à la Révolution nationale ne puisse être perpétrée par l’un quelconque des pouvoirs élus, comme ce fut la cas lors de la volonté par l’ancien président de la République de ne pas faire passer une loi visant la qualification de crime du pouvoir colonial en Algérie.

Quels seraient, en effet, les bénéfices d’un tel Haut Conseil dans l’édifice constitutionnel de l’Etat ? Le pouvoir politique en Algérie, dans son intérêt bien compris de raffermir les institutions de l’Etat, ne peut plus se permettre une atteinte vitale à l’idéologie de l’indépendance nationale, fondée à régir le jeu des organes étatiques mais qui prend les contours, aujourd’hui, d’un révisionnisme dangereux pour la stabilité du pays. Un Haut Conseil de la Révolution algérienne formerait un bloc constitutionnel de principes inébranlables, que le peuple entendrait comme des lignes rouges infranchissables par quiconque, simple citoyen, ou élu représentant l’Etat à tous les niveaux. Les membres d’un tel haut conseil jouiraient d’une légitimité historique irréprochable ainsi que d’une vision purement apolitique des intérêts de l’Etat. Bien plus, il opérerait par consensus un filtrage des pratiques et des discours qui, soit de façon directe ou indirecte, constitueraient des attaques hostiles à l’Algérie indépendante.

Même si de larges pans de l’histoire de la libération nationale reste encore à écrire, d’une façon qui fasse honneur à la science historique, il ne reste pas moins que l’Algérie politique indépendante est aujourd’hui une réalité incontournable qui jouit d’un appareil d’Etat et idéologique issu en droite ligne des principes de la déclaration du 1er Novembre 1954. Ce sont ces acteurs qui, seuls, seront habilités à défendre, contre l’ethnicisme, le régionalisme et le révisionnisme, et au nom des principes vitaux de sauvegarde de l’Etat, toute infraction à la morale et à la mémoire de nos nombreux martyrs.

A. K.


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