Plan d’action du gouvernement

En quête de moyens et d’efficacité



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Des indicateurs statistiques sont primordiaux pour assurer la réussite du plan d’action. C’est en fait l’élément essentiel pour l’élaboration des stratégies de développement. Les retards sont donc à rattraper à différents niveaux et le risque de tomber dans la politique du replâtrage est bien là, et ce, en l’absence d’un système national d’information statistique, économique et sociale, basé sur la transparence, l’actualisation et l’authentification des données. Le manque de coordination entre les différents départements pose également problème. Il s’agit donc d’en finir avec les estimations approximatives pour mieux cibler les dépenses en ces temps de disette.

 

Quelle méthodologie adopter, avec quels moyens, pour quelles priorités et quid des délais d’exécution du plan d’action du gouvernement ?

Ce sont, entre autres, parmi les questions de l’heure. Des questions abordées lors de la réunion walis-gouvernement qui se tient depuis hier et qui intervient au lendemain de l’approbation par l’Assemblée populaire nationale (APN) consacrée essentiellement à l’examen des mesures à même d’accélérer la mise en œuvre dudit plan à travers tous ses volets, notamment en ce qui concerne les urgences de l’heure.

Emploi, investissement local, gouvernance, pouvoir d’achat et bien d’autres dossiers constituent en effet le lot des attentes exprimées à travers différentes régions du pays. Des attentes certes identifiées dans le plan d’action, mais non quantifiées de manière exhaustive. Il y a surtout cette absence de détail sur la vision à mener, les moyens d’action, les méthodes et les actions à privilégier.

Ce qui pose le problème de l’efficacité de l’action économique et sociale justement et freine la prise en charge effective des urgences. Ce qui risque également d’affecter la mise en œuvre du plan d’action du gouvernement, que ce soit pour les coûts, les délais ou le ciblage. «Car, il faut bien cibler les mesures», nous dit un économiste à ce sujet. Or, en l’absence de données, difficile d’assurer cette condition.

C’est dire qu’au-delà des disponibilités financières en cette période de crise et dans ce contexte de baisse de la demande mondiale en brut, comme l’a souligné l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) dans son dernier rapport mensuel, c’est toute la problématique de la fiabilité de l’information statistique qui se pose. Une défaillance qui vient compliquer la mise en marche du plan en question.

Ce point a d’ailleurs été relevé dans le document adopté. «L’efficacité de l’action économique de l’Etat est tributaire de ses capacités de prévision qui, elles-mêmes doivent pouvoir compter sur un outil statistique puissant et fiable, qui bénéficiera d’un renforcement substantiel en moyens humains et matériels», est-il indiqué dans ledit plan.

Pour faire face à ce manquement, le cap est mis sur la réalisation prochaine d’un Recensement général des populations et de l’habitat (RGPH). Cette opération était déjà prévue et annoncée en 2019. Le dernier recensement en date remonte, faut-il le rappeler, à 2008.

C’est-à-dire qu’on a dépassé la période décennale de deux ans, alors qu’une périodicité de cinq ans était prévue pour le RGPH. Cependant, rien n’a été fait. Et voilà qu’avec l’installation de Abdelmadjid Tebboune à la tête de l’Etat, on remet l’accent sur l’importance de l’information statistique sans pour autant mettre le paquet à cet effet et sans cerner clairement les objectifs.

Dans sa recommandation, Tebboune a avancé qu’il est question de «déterminer la consommation nationale quotidienne». «Ce qui est complètement erroné», selon Nacer-Eddine Hammouda qui nous dira : «Les RGPH en Algérie ne saisissent ni la consommation ni les revenus.» D’où la nécessité, selon lui, de mener une enquête sur les dépenses de consommation juste après la réalisation du recensement. Mais sur des bases et des références solides, car il est utile de souligner dans ce cadre que les méthodes n’ont pas évolué entre-temps.

Exemple : l’indice des prix à la consommation est calculé sur la base d’un panier moyen de 2000 et des prix de référence de 2001. Or, les prix d’il y a 20 ans ne sont plus les mêmes que ceux d’aujourd’hui. Autrement dit, les références sont d’emblée fausses et faussées pour le calcul du taux d’inflation. Et dire qu’on parle dans le plan d’action «d’accroissement et de consolidation du pouvoir d’achat du citoyen».

De même que le gouvernement s’engage à revaloriser le Salaire national minimum garanti (SNMG) afin d’assurer au citoyen un revenu décent. Mais la détermination d’un nouveau SNMG a nécessité des chiffres fiables également nécessaires pour la prise en charge des populations et pour développer des mécanismes transparents assurant le ciblage optimal des véritables bénéficiaires des aides de l’Etat.

Ces données s’imposent par ailleurs pour l’identification du tissu économique et des besoins du monde de l’entreprise. Plus globalement pour la refonte de tout le système économique et de la politique financière. «Créer les mécanismes et l’écosystème adéquats pour la relance du développement et l’émergence d’une économie diversifiée, pérenne, créatrice d’emplois et de richesses et libérée du carcan bureaucratique», tel que souligné dans le plan d’action qui nécessite en plus des financements d’avoir au préalable un outil fiable que constituent les données statistiques de manière globale et le RGPH de manière particulière. Un recensement considéré théoriquement comme stratégique pour l’élaboration des politiques publiques.

Mais négligé pendant de longues années en Algérie où les décideurs ont toujours privilégié le courtermisme au détriment des stratégies futures. Il faut dire en effet que les moyens font défaut pour pouvoir constituer une base de données statistiques.

Des limites qui ont bloqué la lutte contre l’informel, la réduction de poches de pauvreté et des inégalités régionales, l’identification des besoins en produits de large consommation, pour ne citer que ces exemples. «Pour un pays de plus de 238 millions de kilomètres carrés, l’Office national des statistiques (ONS) ne dispose que de quatre Directions régionales (DR), alors que déjà dans les années 90’, 6 DR étaient prévues», nous rappellera dans l’entretien le statisticien Nacer-Eddine Hammouda ayant longuement travaillé sur ce dossier. Il regrettera par ailleurs le déficit en démographes, comptables nationaux et de spécialistes en sondage.

Autant de défaillances à rattraper parallèlement à la mise en œuvre du plan d’action. Le travail s’annonce en tout cas complexe, puisque ce sont deux chantiers ardus qui sont à mener alors que les moyens financiers, matériels et humains nécessaires au RGPH – qui permettra d’identifier le nombre exact de la population, des agglomérations et leur répartition géographique – font défaut. D’un autre côté, des indicateurs statistiques sont primordiaux pour assurer la réussite du plan d’action.

C’est en fait l’élément essentiel pour l’élaboration des stratégies de développement. Les retards sont donc à rattraper à différents niveaux et le risque de tomber dans la politique du replâtrage est bien là, et ce, en l’absence d’un système national d’information statistique, économique et social, basé sur la transparence, l’actualisation et l’authentification des données. Le manque de coordination entre les différents départements pose également problème.

Ce sont autant d’éléments manquants pour l’élaboration d’une vision à long terme loin des mesures conjoncturelles financées par la rente. Il faudrait donc accélérer le lancement du RGPH, celui du tissu économique et de l’agriculture.

C’est-à-dire passer à l’action et en finir avec les instructions sans suivi. Dans ce sens, le chef de l’Etat, qui a rappelé que «l’économie ne repose pas sur des estimations approximatives mais sur des statistiques exactes», a instruit également la création «d’un réseau interactif de statistiques s’étendant à tout le territoire national, de la commune au ministère en charge des statistiques en vue de faciliter la maîtrise de l’économie».

Ce qui soulève encore la problématique de la gouvernance et de la transparence aux niveaux local, administratif et institutionnel. Considérée comme un tabou et un objet de divergences, comme cela a toujours été le cas, il y a lieu plutôt d’en faire un moyen pour la mise en œuvre des politiques de développement, surtout que le temps n’est plus au gaspillage et aux dépenses hasardeuses.

Les moyens financiers faisant défaut, le recours au financement extérieur n’est pas écarté. Le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, l’a souligné devant les députés. Il a également relevé la possibilité de récupérer «beaucoup d’argent» existant dans le circuit informel, parlant de «centaines de milliards». Mais encore sans être exhaustif.

C’est dire que les chiffres ne sont pas maîtrisés et que les responsables sont toujours dans l’approximatif au moment où ils tablent sur «le renouveau économique» et «la rupture totale» avec les anciennes pratiques.

 

> Dossier réalisé par   Samira Imadalou


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