Des journaliers sans revenu depuis la mi-mars

 Quand le confinement fait le lit de la précarité



...

La propagation du Covid-19 et l’absence de mécanismes d’aide pour les citoyens impactés ont propulsé beaucoup de journaliers dans un dénuement total. Et en l’absence de chiffres officiels à propos de ces journaliers ou même des employés des entreprises privées qui ont été mis en congé sans solde, personne n’est en mesure de s’exprimer sur l’ampleur des dégâts.

Beaucoup de familles algériennes souffrent des effets du confinement instauré en Algérie depuis la mi-mars dernier.

Même si les autorités n’ont fourni aucun chiffre sur leur nombre, il n’en demeure pas moins qu’elles sont très nombreuses à s’être retrouvées sans revenu.

En plus de certains commerçants, par exemple, dont l’activité a été suspendue durant cette période, il y a les journaliers, souvent non déclarés, qui en temps normal déjà n’arrivaient pas à joindre les deux bouts.

Ce sont eux qui attendent avec le plus d’impatience la levée du confinement. Et, paradoxalement, ce sont eux aussi que le communiqué du dernier Conseil des ministres n’a pas évoqués.

En effet, lors du dernier Conseil, il est indiqué que la président de la République «a chargé également le ministre de l’Industrie et celui du Commerce d’élaborer en urgence, en coordination avec la Chambre algérienne du commerce et de l’industrie (CACI) et les chambres régionales sous l’égide du Premier ministre, une étude sur la situation des artisans et des petits commerçants impactés par la pandémie de Covid-19 en proposant des mécanismes d’aide».

Il est annoncé également l’«examen des possibilités d’aide aux petits commerçants impactés, y compris leur éventuelle exonération partielle des impôts».

Mais pour les autres, c’est-à-dire pour ces journaliers ou même des employés du secteur privé qui ont été libérés «sans solde», seul le délai d’inscription pour la remise de la modique somme de 10 000 DA a été prorogé.

«Le président de la République a également ordonné la prolongation de la mesure portant remise de l’allocation de 10 000 DA au profit des personnes impactées recensées, et ce, jusqu’à la levée du confinement sanitaire, donnant, à cet égard, des instructions pour maintenir la liste ouverte afin de permettre aux retardataires de s’y inscrire», a-t-on indiqué dans ce même communiqué.

Que peut faire une famille algérienne qui se retrouve sans revenu durant presque trois mois avec une allocation de 10 000 DA?

Des familles sans revenu

Salim est un père de famille de 36 ans. Il n’a pas de poste d’emploi fixe. Chaque jour, il sort le matin à la recherche d’un travail à faire durant la journée qui lui permettra d’acheter l’essentiel des produits alimentaires.

«Depuis le début du confinement, je ne fais presque rien. Je n’arrive plus à travailler comme je le faisais auparavant.

Ces derniers temps, j’exerçais dans un café, mais celui-ci est fermé. Si j’arrive à nourrir mes enfants, c’est surtout grâce à l’aide de quelques personnes de mon quartier, ainsi que de certains commerçants qui, conscients de ma situation, ont accepté de me faire crédit jusqu’à ce que la situation s’améliore», nous a-t-il dit.

Bien que conscient de la gravité du coronavirus, pour Salim, la priorité est de pouvoir trouver de quoi nourrir ses enfants, au nombre de deux, et son épouse.

«Les deux premières semaines, je suis resté chez moi. On avait tous peur du coronavirus. On croyait que ça allait vite disparaître. Mais après, je ne pouvais plus. Au bout de ces 15 jours, j’étais obligé de sortir chercher du travail», a-t-il ajouté.

Or, avec la fermeture des commerces, le ralentissement de l’activité économique et l’arrêt des chantiers, entre autres, il n’avait que peu de chance d’y arriver. «Je réussis périodiquement à trouver une petite bricole, mais bien sûr ça ne suffit pas», a-t-il précisé.

Si les commerçants peuvent éventuellement recevoir une compensation, comme signalé dans le communiqué du Conseil des ministres, par une «exonération partielle des impôts», il n’en est rien pour Salim et toutes les personnes qui sont dans la même situation.

D’ailleurs, même l’allocation de 10 000 DA, instaurée au mois d’avril, n’a pu être attribuée à toutes les personnes impactées par le coronavirus.

«J’ai déposé un dossier au mois d’avril. Mais je n’ai rien touché. Apparemment, face à la forte demande, les services de l’APC ont finalement décidé de l’octroyer aux personnes qui étaient inscrites l’année passée dans le fichier du couffin de Ramadhan.

Et moi, je ne l’étais pas», nous a affirmé Salim. L’informant que les autorités ont décidé de proroger le délai, celui-ci nous dira qu’il va s’approcher une nouvelle fois des services de l’APC pour voir.

«L’allocation de 10 00 DA seulement pour les bénéficiaires du couffin de Ramadhan»

Rabah, lui, est un jeune de 25 ans, exerçant en tant que receveur dans un bus privé, à l’arrêt aussi depuis le début du confinement. Son père décédé et sa mère femme au foyer, c’est lui qui subvient aux besoins de la famille de quatre personnes. Rabah nous a indiqué que sa mère a pu obtenir les 10 000 DA.

Ils sont inscrits dans le fichier des bénéficiaires du couffin du Ramadhan depuis quelques années déjà. Mais il s’est dit ne pas comprendre comment a été définie cette somme-là.

«Même quand tu vis une vie de misère, c’est-à-dire que tu n’achètes que le strict minimum, tu ne pourras pas tenir plus de 10 jours avec 10 000 DA», a-t-il estimé.

Rabah s’est entre-temps reconverti dans la vente de légumes dans l’un des marchés de la ville de l’Ouest algérois. «Heureusement que j’ai trouvé ce travail, sinon je ne sais pas comment j’aurais pu tenir», a-t-il déclaré.

Ahmed, quant à lui, est serveur dans un café. Père de famille lui aussi, il a décidé, après seulement quelques jours de l’instauration du confinement partiel, de travailler clandestinement.

Il l’est vis-à-vis de la loi au vu de l’ordre de fermeture des cafés, et du propriétaire de l’établissement où il exerce, qui ne sait pas qu’il sert du café à des clients le rideau baissé. «Je suis resté chez moi pendant quelques jours, mais ce n’était plus possible.

J’ai décidé alors, sans même aviser le propriétaire, de servir du café au noir aux gens pendant quelques heures de la journée, notamment la matinée, et en soirée durant le Ramadhan», nous a-t-il confié. Pour lui, il est inenvisageable de rester longtemps sans travailler. «Je n’avais pas un salaire fameux qui me permettait de mettre de l’argent de côté.

Après quelques jours d’arrêt, je n’avais plus aucun sou. J’étais obligé de travailler. Je me suis dit que même si je risque d’avoir des soucis avec la justice, il fallait que je travaille.

Et je le faisais avec la peur au ventre. Heureusement que jusque-là, je n’ai eu aucun souci», a-t-il déclaré. «Je risque la prison et la maladie pour nourrir mes enfants», nous a-t-il lancé.

Ahmed, Rabah, Salim et beaucoup d’autres espèrent voir le confinement levé dans les plus brefs délais. «Nous sommes en train de mendier», nous dira Salim.

Et ce n’est pas l’allocation «symbolique» de 10 000 DA, que beaucoup n’ont d’ailleurs pas touchée, qui va régler le problème.

Si le confinement a été préconisé par les scientifiques pour freiner la propagation du Covid-19, l’absence de mécanismes d’aide pour les citoyens impactés a propulsé beaucoup d’entre eux dans un dénuement total.

Et en l’absence de chiffres officiels à propos de ces journaliers ou même des employés des entreprises privées qui ont été mis en congé sans solde, personne n’est en mesure de s’exprimer sur l’ampleur des dégâts, même s’il est clair qu’ils seraient très importants.          


Lire la suite sur El Watan.

Publier des annonces gratuites

Autres sites

Sciencedz.net : le site des sciences
Le site des sciences en Algérie


Vous cherchez un emploi? Essayer la recherche d'emploi en Algérie
Babalweb Annonces Babalweb Annonces
Petites annonces gratuites