Pr Kamel Djenouhat. Professeur en immunologie, chef de service à l’hôpital de Rouiba et président de la Société algérienne d’immunologie

«Les tests sérologiques ont leur place à un moment donné pour une orientation diagnostique»



...

– Le recours au tests rapides ou tests sérologiques est actuellement fréquent devant une suspicion de contamination et l’explosion du nombre de cas Covid-19. Est-ce qu’ils sont aussi fiables que la PCR ?

En matière d’examens biologiques, on préfère parler de la pertinence et non pas de la fiabilité du test.

En effet, la pertinence d’un test biologique dépend de sa spécificité (est-ce que tous les patients testés postifs SARS-Cov2 sont atteints de la Covid-19 ?) et de sa sensibilité (est-ce que tous les patients atteints de la Covid-19 sont détectables par le test ?) à la fois, alors que la fiabilité fait allusion surtout à la reproductibilité du test, c’est-à-dire si on teste et reteste l’échantillon, et on voit si on trouve le même résultat.

On note que la PCR, le test de référence recommandé par l’OMS pour le diagnostic, ne peut en aucun cas détecter tous les malades Covid-19, et elle peut passer à côté de 30% des malades Covid-19, surtout si on est à la deuxième semaine de la maladie.

En ce qui concerne les tests sérologiques rapides ou non, ils trouvent leur place à partir de la deuxième semaine pour une orientation diagnostique.

– Dans quel contexte ces tests doivent-ils être utilisés ?

Il existe trois principales indications de ces tests et je préfère commencer par celle qui a suscité une grande polémique dans le milieu médical et biologique, et reste primordiale à mon avis : c’est un test d’orientation diagnostique chez les patients se présentant avec une forte suspicion diagnostique sur la base de données cliniques et radiologiques en faveur de la Covid-19 alors que la PCR est revenue négative ou n’a pas été réalisée par manque de moyens ou d’indisponibilité du test.

Connaissant la pénurie de ce test dans plusieurs centres du diagnostic et, parfois, le retard engendré pour la remise de résultats de la PCR allant jusqu’à 7 à 10 jours (malade déjà sorti), et en se basant sur des résultats préliminaires réalisés localement qui ont bien montré que deux tiers des patients avec PCR positive ont aussi une sérologie positive, cela est dû principalement aux spécificités du malade algérien qui ne consulte qu’à un stade avancé.

Pour ce qui est des deux autres indications, on note le dépistage des populations exposées à un risque accru de contamination qui peuvent être souvent asymptomatiques et enfin, ces tests constituent un outil précieux pour la réalisation des études épidémiologiques.

– Au cas où la sérologie est positive, que doit-on faire ?

Avant de répondre à cette question, j’insiste sur deux points essentiels : l’interprétation de ces tests doit être établie en fonction des signes cliniques et/ou radiologiques et surtout par un personnel habilité à interpréter les tests sérologiques.
En effet, face à un test sérologique positif, l’idéal est de prescrire une PCR.

La positivité des tests sérologiques témoigne chez la majorité des patients que le virus a déjà été contracté depuis au moins sept jours. Sans tenir compte de la classe d’anticorps secrétée (IgM, IgG ou IgA), la positivité de ce test correspond à une des quatre interprétations suivantes :

– Malade présentant des signes cliniques et/radiologiques en faveur de l’affection, dans ce cas là, on peut confirmer l’atteinte du patient par la Covid-19 depuis au moins une semaine

– Sujet asymptomatique : il peut s’agir d’une contamination par le virus depuis au moins sept jours au minimum, et dans ce cas-là, le patient peut commencer à développer les signes cliniques quelques jours plus tard, comme il peut ne jamais développer de symptômes (porteurs sains)

– Sujet guéris : dans cette situation, le sujet peut rapporter une symptomatologie de la Covid-19 dans un minimum de quinze jours précédant la réalisation du test, comme il peut s’agir d’une évolution naturelle d’une infection passée inaperçue.

– un résultat faux-positif signifie que le sujet n’a jamais contracté le virus Sars-CoV 2, et cette positivité n’est que la résultante de la présence d’anticorps dirigés contre d’autres microbes qui présentent des similitudes de structure avec ce virus.

– Le ministère de la Santé n’a pour le moment émis aucune recommandation relative à l’utilisation des tests sérologiques attestant que ces tests ne sont pas validés par l’OMS. Qu’en pensez -vous ?

Je dois juste préciser que ces tests sont utilisés ailleurs dans le monde et chaque pays s’adapte selon la disponibilité de moyens dont il dispose.

L’Oms n’a pas validé aussi le protocole thérapeutique, en l’occurrence l’hydroxychloroquine et l’azitromycine approuvé par le conseil scientifique et le ministère de la Santé, mais il est utilisé pour traiter les patients Covid-19 au niveau de toutes les structures hospitalières.

– Pensez-vous que les mesures de confinement sont suffisantes pour freiner la propagation du virus sans le recours au dépistage  systématique ?

Dans un souci de mieux cerner la propagation du virus, il a été convenu au début de la pandémie, et il me semble qu’il y a eu une instruction ministérielle dans ce sens, que les enquêtes épidémiologiques devraient suivre et se faire dans l’entourage de chaque malade diagnostiqué positif à la Covid-19.

Chose qui, malheureusement, n’a pas été concrétisée sur le terrain, faisant d’elle un des éléments primordiaux à l’origine de ce phénomène de rebond.

Dans l’état actuel des choses, en plus des mesures de confinement, on doit rester très vigilants et sensibiliser encore une fois la population par rapport aux mesures préventives, il me semble que le recours au dépistage systématique au moins des personnes en contact avec les malades atteints de la Covid-19 reste de mise.

– Le virus serait, selon certains spécialistes, plus virulent ces derniers mois. Quelles en sont d’après vous les raisons ?

Le virus Sars-CoV-2 a subi une mutation qui a touché la partie responsable de sa liaison à son récepteur ACE-2 pour infecter les cellules.

En effet, les études ont montré que la souche circulante en Europe et dans une grande partie des Etats-Unis présentant la mutation D614G exprime à sa surface une molécule spike plus flexible et plus résistante, qui serait par conséquent plus contagieuse mais pas plus virulente.

Par ailleurs, s’il est devenu plus contagieux, cela sous-entend qu’il y aura plus de nouveaux cas et par conséquent plus de malades nécessitant une prise en charge en soins intensifs.

Ce qui a réellement été constaté ces dernières semaines sur le terrain ou à travers les chiffres communiqués par le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière. 


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