Procès de «Madame Maya» reporté au 26 août

Les avocats réclament la présence de Mohamed Rougab, secrétaire de Bouteflika



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Les deux affaires liées à la sulfureuse «Madame Maya», connue comme étant «la fille cachée» du Président déchu, ont été renvoyées hier, par le tribunal de Chéraga, au 26 du mois en cours. Elles concernent, pour la première, deux ex-ministres, Abdelghani Zaalane et Mohamed Ghazi, ainsi qu’un ex-député, poursuivis par la Cour suprême, et la seconde, neuf autres prévenus ayant été déférés devant le tribunal, dont «Madame Maya», ses deux filles, le fils de Mohamed Ghazi et Abdelghani Hamel, ex-DGSN, tous poursuivis pour, entre autres, «blanchiment d’argent», «trafic d’influence», «octroi d’indus avantages», «dilapidation de deniers publics», «incitation d’agents publics pour l’octroi d’indus avantages» et «transfert illicite de devises vers l’étranger».

Prévu hier au tribunal de Chéraga, le procès de «Madame Maya» n’a pas eu lieu. Il a été renvoyé au 26 août. Dès l’ouverture de l’audience, vers 10h, neuf prévenus en détention étaient déjà dans le box. Très exiguë, la salle est pleine à craquer.

Le juge commence par le dossier de la Cour suprême et qui concerne les deux ex-ministres, Abdelghani Zaalane, des Travaux publics, Mohamed Ghazi, du Travail, poursuivis en tant qu’anciens walis d’Oran et de Chlef, et d’un ex-député, Amar Yahiaoui, tous en détention.

Me Salim Hadjouti, avocat de Mohamed Ghazi, prend la parole. «Monsieur le juge, nous insistons sur la présence de Mohamed Rougab, secrétaire du président Bouteflika, dont l’audition est importante pour nous», dit-il, et le juge réplique : «Tous les témoins sont importants. Ils seront convoqués.» D’autres avocats demandent le report de l’affaire. Le magistrat accepte et décide de la date du 26 août pour le procès.

Il suspend l’audience et après une quinzaine de minutes, il reprend sa place. Il passe à la deuxième affaire, instruite par le tribunal de Chéraga et au centre de laquelle se trouve «Mme Maya», de son vrai nom Nachinachi Zoulikha-Chafika (en détention), ses deux filles, Imane et Farah, en liberté, Abdelghani Belaïd (en détention), Miloud Benaiche (en détention), Chafik Ghazi (en détention), Abdelghani Hamel, ex-patron de la police (en détention), Belkacem Bensmina (en détention), Karim Goujil (en détention), Mustapha Boutaleb, chef du protocole au ministère du Travail (en détention), et Mohamed Cherif, dit Siousiou, en fuite.

De nombreux avocats s’avancent et réclament le renvoi de l’affaire, pour avoir plus de temps afin de prendre connaissance des ordonnances de renvoi, et d’autres pour des considérations sanitaires liées à la pandémie.

Le juge décide de renvoyer le procès au 26 août, en précisant au représentant du ministère public de convoquer la quinzaine de témoins cités dans les deux affaires.

Subitement, du fond du box, une voix féminine surprend l’assistance. «Mme Maya» s’octroi la parole. «Monsieur le juge, cela fait sept mois que je n’ai pas vu mes enfants. Je veux les voir», lance-t-elle avant que le magistrat ne l’interrompt : «Je n’ai pas les prérogatives de vous autoriser à voir vos enfants. Vous êtes devant le tribunal.»

Des propos qui ne semblent pas convaincre la prévenue, qui persiste à réclamer la visite de ses deux filles, qui avaient purgé une peine de 18 mois de prison pour une affaire de «détention de faux passeports», avec lesquels elles étaient sur le point de quitter le pays.

Il faut dire que l’affaire «Mme Maya» a fait couler beaucoup d’encre depuis son arrestation en juillet 2019, dans sa villa n°143 située à la résidence d’Etat Moretti, à l’ouest de la capitale. Présentée comme la «fille cachée» du Président déchu, Madame Maya n’est pas une femme ordinaire.

Sompteuses villas, luxueuses voitures et comptes bien garnis de «Lemaâlma»

Très riche, avec des biens en Algérie et à l’étranger, des comptes en banque bien garnis en dinars et en devises, des relations avec les plus hauts fonctionnaires de l’Etat, des walis et des responsables des services de sécurité, une escorte et une protection policière 24 heures sur 24.

Pour elle, tout a commencé au début des années 2000, lorsqu’elle a eu une entrevue avec le Président déchu, «une connaissance» de son père, qui était un ancien moudjahid.

Elle profite pour lui parler d’un terrain qu’elle voulait avoir à Chlef, pour en faire un parc de loisirs, mais que la wilaya lui a refusé. Bouteflika lui promet de résoudre le problème et 24 heures après, c’est son secrétaire particulier, Mohamed Rougab, qui l’appelle et lui demande de passer à la Présidence, où il lui annonce un rendez-vous avec le wali de Chlef, alors Mohamed Ghazi.

Ce dernier l’accueille comme «membre de la famille» de Bouteflika et lui accorde le terrain en question, appartenant pourtant à la direction des forêts. «Mme Maya» venait d’entrer dans le monde des affaires. Au fil des années, son carnet d’adresses se renforce par les contacts de nombreux walis, chefs de daïra, ministres, etc., et ce, grâce aux «coups de pouce» de Mohamed Rougab, qui l’introduisait dans les rouages de l’Etat, avec sa formule magique : «Prenez soin d’elle. Elle fait partie de la famille du raïs (Président).»

«Mme Maya» en a fait un moyen d’enrichissement, en monnayant les «services rendus» à des députés, sénateurs, commerçants, hommes d’affaires et entrepreneurs, en quête de terrains à travers les wilayas les plus prisées et dans tous les domaines. Très connue par les locataires de la résidence d’Etat Moretti, sa villa n°143 est devenue, au fil du temps, le lieu de rencontre des personnalités les plus influentes.

Sa fortune a explosé de manière fulgurante à travers les années. Après avoir réalisé son parc de loisirs à Chlef, entre 2006, elle obtient un terrain de 2500 m2 toujours à Chlef, et en 2007, elle achète une villa à Hydra, puis revend le terrain de Chlef, pour réserver et payer la totalité du prix de 3 appartements promotionnels achetés auprès de l’OPGI de Bir Mourad Raïs.

En 2009, elle s’offre une villa à Moretti, au prix de 30 millions de dinars, deux maisons coloniales à Hydra, puis une autre située à la cité Malki, à Hydra, une autre à Ben Aknoun, en 2012, qu’elle met en location. Entre 2014 et 2015, elle se paye une troisième villa à Moretti qu’elle loue à une organisation onusienne en dollars.

Puis, elle investit en Espagne, où elle achète un chalet et deux appartements, pour un montant de près de 1,5 million d’euros et s’offre plusieurs voitures de luxe.

Subitement, en 2017, lorsqu’elle rencontre Abdelghani Zaalane, alors wali d’Oran, sur recommandation de Mohamed Ghazi qui la présente comme la fille cachée du président Bouteflika, tout va changer.

L’ex-wali d’Oran appelle Saïd Bouteflika  pour lui faire savoir que le terrain de sa «sœur» a été réglé, mais le frère du Président déchu lui fait savoir qu’elle n’est pas membre de la famille.

Etonné, Zaalane décide d’annuler les décisions et Saïd Bouteflika instruit le général Tartag, alors coordinateur des services de la sécurité intérieure, de «faire une enquête et mettre fin aux agissements» de Mme Maya.

Celle-ci est alors arrêtée au mois de juin 2017 à Moretti, dans sa villa, où près de 430 millions de dinars, d’importantes sommes en devises et une dizaine de kilos de bijoux en or sont saisis. Mais l’affaire n’ira pas loin. Mme Maya est relâchée et aucun des responsables n’a été inquiété.

Il a fallu attendre juillet 2019, alors que le pays vit une importe révolte populaire contre le régime, pour que les services de la gendarmerie interviennent. Et c’est Ghali Belkebir en personne, en tant que patron de la gendarmerie, qui chapeaute l’opération. L’affaire refait surface et le parquet de Chéraga est saisi.

Il pond un communiqué pour annoncer la découverte hallucinante : 12 milliards de centimes, 270 000 euros, 30 000 dollars, 17 kilogrammes de bijoux en or et plusieurs documents de voyage dans la somptueuse villa de «Mme Maya».

Dans sa chute, elle entraîne Mohamed Ghazi, ministre du Travail, son fils, Abdelghani Zaalane et Abdelghani Hamel, qui lui avait affecté une équipe de protection, et lui a installé des caméras de surveillance autour de sa maison.

En tout, 12 personnes, dont une en fuite, sont poursuivies pour «violation de la réglementation et du règlement relatifs au change et au mouvement des capitaux de et vers l’étranger», «abus de fonction», «obtention et octroi d’indus avantage» et «trafic d’influence».

Mais, l’énigmatique Mohamed Rougab n’apparaît dans le dossier que comme témoin, alors que tout a commencé à partir de son bureau et «Lemaâlma» (la cheffe), le deuxième surnom de «Mme Maya», était à chaque fois recommandée par lui en tant que «fille cachée» du Président déchu.

Un statut qui lui a servi de clef pour accéder aux plus hauts fonctionnaires de l’Etat. Raison pour laquelle, les avocats ont réclamé hier sa présence au procès, prévu le 26 août. 


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