Constitution

le poids grandissant des islamistes



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Les résultats du référendum pour la nouvelle Constitution indiquent nettement une désaffection totale des populations par rapport à la politique, voire un désenchantement face à une situation figée rendue difficile par la pandémie du coronavirus. On ignore certainement à Alger les dégâts causés par les mesures de fermeture de plusieurs activités qui faisaient vivre des centaines de milliers de familles. Il faut côtoyer ces populations soudainement appauvries pour comprendre leur désarroi. D’ailleurs, on ne peut même pas dire que ce fut un vote sanction. C’est plutôt le non-vote de la désillusion et d’un profond désespoir qui gagne de larges couches du peuple.
D’un autre côté, une lecture plus politique de ces résultats nous laisse croire qu’une Constitution soutenue par toutes les forces qui tournaient autour de Bouteflika devait être forcément mal vue. Pourtant, ce texte d’équilibre des pouvoirs et de larges libertés représente pour le nouveau pouvoir la clé qui va lui permettre d’ouvrir la porte des profondes réformes qu’il compte entreprendre pour dessiner les contours de  l’Algérie nouvelle». Mais lorsque c’est le FLN et le RND, ainsi que les partis collés aux «coalitions» qui soutiennent tapageusement le projet, lorsque le discours utilisé emprunte au bouteflikisme ses recettes et son bavardage et lorsque les contours d’une société civile ressemblant étrangement à «l’autre» ne sont pas clarifiés, il ne faut guère s’attendre à une large adhésion du peuple. Ce dernier exprime de la sorte son aversion pour ces pratiques qu’il croyait bannies à jamais.
Mais, nous diront certains, l’essentiel est que la Loi fondamentale soit passée. Le nouveau pouvoir peut entamer ses réformes et déblayer le terrain pour un changement radical des mœurs politiques. Mais, encore une fois, avec qui ? La grande leçon de ce vote ne pose-t-elle pas d’une manière claire la question de la classe politique et de son implication dans la vie nationale ? On a vu comment, en dehors des partis soutenant traditionnellement n’importe quel pouvoir, toute l’opposition, qu’elle soit démocrate ou islamiste, s’est liguée contre la Constitution. Les mouvements qui se réclament de l’islam politique ont subitement sorti leurs griffes. Silencieux, voire nullement dérangés par l’amazighité durant le règne de Bouteflika, les voilà qui pourfendent cette langue, pourtant reconnue comme nationale et officielle. De l’autre côté, les forces démocratiques – ou ce qui en reste ­— n’ont pas su saisir l’importance de cette Constitution qui instaure une vie politique moderne et assure aux institutions élues une large place. Ces partis font du boycott de l’élection un acte politique contre le pouvoir. Pour eux, les revendications du Hirak sont passées à la trappe et c’est suffisant pour ne pas cautionner ce pouvoir.
Tout cela pose la question centrale que nous avons déjà esquissée : avec qui M. Tebboune va-t-il gouverner ? S’il ne veut pas s’encombrer d’un FLN ou d’un RND décriés, il ne reste que quelques mouvements sans profond ancrage. Tous les autres font partie de l’opposition. L’idée d’intégrer la société civile dans la politique n’est pas vraiment ce qu’il y a de mieux dans la panoplie des choix qui s’offrent au nouveau pouvoir. D’abord, par sa nature même, la société civile n’est pas la société politique. Quand on va dans une association, on a des objectifs communs dans un domaine donné de la vie sociale, mais on peut venir de la gauche, de la droite, des milieux démocrates ou d’un mouvement islamiste. C’est cela la société civile. Elle ne peut pas jouer un rôle politique à moins de l’utiliser dans les rassemblements folkloriques comme cela se faisait dans la tradition bouteflikienne, ce qui a fait réagir le peuple avec son humour caustique qui a qualifié les opportunistes de « cachiristes » par rapport au casse-croûte qu’ils recevaient au cours de leurs déplacements.
En donnant plus d’importance à l’élu, la nouvelle Constitution va nécessairement créer des situations difficiles pour l’exécutif même si des verrous ont été mis pour éviter les clash et les sempiternelles chutes de gouvernement. En évitant les excès d’un pouvoir parlementaire et en gardant au chef de l’État son rôle d’arbitre, cette Loi fondamentale répond aux exigences de l’heure parce qu’il faut garder en mémoire les déboires du parlementarisme dans un pays voisin qui n’arrive toujours pas à sortir des crises politiques. Nos pays ne sont pas l’Angleterre et il ne faut jamais oublier que ce type de démocratie se construit après des siècles. Même la France, qui compte pourtant une longue tradition démocratique, donne un rôle plus important à l’exécutif : c’est le Général de Gaulle lui-même qui a tracé les contours de la cinquième République.
Ce que je prévois est que l’opposition, réticente à s’engager dans les rendez-vous fixés par le pouvoir, sera fortement présente lors des élections locales et législatives. S’ils ont boycotté la Constitution, cela ne veut pas dire que les partis de l’opposition ne l’ont pas lue. Ils savent quel rôle elle accorde à l’élu et ce qu’elle peut créer comme situations conflictuelles avec le chef de l’exécutif en cas de cohabitation.
Tous ces désagréments pourraient être évités si ce nouveau pouvoir avait rapidement agi pour créer son propre parti au lieu de lorgner vers un FLN et un RND relookés avec de l’ancien et une société civile déjantée. Pour ne pas l’avoir fait, le président tunisien est en situation d’antagonisme presque permanent avec Ennahda. Par contre, Macron a tout de suite compris l’importance d’avoir sa propre majorité au Parlement. Sur la lancée de sa victoire, il a su mettre en place rapidement un mouvement qui remporta les élections législatives. Depuis, il est conforté dans ses grandes décisions.
Il reste au pouvoir algérien à innover en la matière parce que continuer de courir sur ces vieux canassons que sont le FLN et le RND, ne mène qu’au peloton de queue. Les islamistes victorieux lors des prochaines échéances ? Hélas, ce scénario du pire est à prévoir. L’immobilisme né de la pandémie, la faiblesse des autres forces politiques, l’utilisation abusive de la religion dans la vie politique et l’absence d’une grande force novatrice portant les idées du nouveau pouvoir sont autant de facteurs qui ouvriront la voie aux islamistes. Comme partout, comme chez nous précédemment, ces gens ne vont pas s’attaquer de front pour résoudre les problèmes innombrables qui se posent à l’Algérie sur les plans économiques et sociaux, mais agiront pour détourner l’attention en prônant le rigorisme, installer l’interdit, attenter à une culture moribonde et encourager la misogynie qui est leur marque de fabrique. Et puis, tout ce beau monde commence à comprendre que M. Charfi est un cas à part. Il ne triche pas !
Parce que certains ont dormi sur leurs lauriers, croyant que le faux barrage des partis du pouvoir, monté grâce au trafic des urnes, allait bloquer pour longtemps la marée islamiste, ils vont se réveiller avec une lourde gueule de bois au lendemain du prochain vote.
M. F.

BOÎTE À IDÉES :
À partir de cette semaine, je reproduis ici les idées qui me sont soumises par les lecteurs sur les thèmes de mes dernières chroniques :
1. Les appelés du Service National ne pouvant plus accomplir ces tâches titanesques au service du développement, car mobilisés autour de leur mission à caractère militaire, pourquoi ne pas faire appel aux prisonniers pour le second Barrage Vert ? 
2. N’est-il pas temps de créer un grand Institut national ou une grande École spécialisée dans les métiers de la forêt ? Avec, pour siège, Djelfa qui est au centre du Barrage vert.
MESSAGES DIVERS :
M. Barkat Sofiane est bloqué en Tunisie depuis des mois. Il ne comprend pas comment certaines familles sont évacuées facilement alors que d’autres souffrent le martyre. Il espère une solution rapide car il n’en peut plus.
 


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