Le réquisitoire du Parlement européen



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Dressant un tableau sombre de la situation des libertés, les parlementaires européens «condamnent, selon la résolution, fermement l’escalade des arrestations et détentions illégales et arbitraires et du harcèlement judiciaire dont sont victimes les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme, les syndicalistes, les avocats, les membres de la société civile et les militants pacifiques en Algérie».

Le Parlement européen a adopté, jeudi dernier, une résolution qualifiée d’«urgente» sur la situation des droits de l’homme en Algérie. Le document, qui se réfère aux dispositions de l’accord d’association Algérie-UE de 2005 et les déclarations onusiennes, appelle les autorités algériennes à respecter «leurs engagements internationaux en la matière».

Dressant un tableau sombre de la situation des libertés, les parlementaires européens «condamnent, selon la résolution, fermement l’escalade des arrestations et détentions illégales et arbitraires et du harcèlement judiciaire dont sont victimes les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme, les syndicalistes, les avocats, les membres de la société civile et les militants pacifiques en Algérie».

Le texte dénonce également «l’absence de toute possibilité de dialogue politique sur la révision constitutionnelle non démocratique et les entraves à l’exercice des libertés d’expression, de réunion et d’association».

Pour le Parlement européen, «le recours à l’introduction de mesures d’urgence dans le contexte de la pandémie de Covid-19 comme prétexte pour restreindre les droits fondamentaux du peuple algérien» est aussi condamnable.

Citant de nombreux cas, la résolution interpelle également le pouvoir sur les détenus d’opinion et politiques, dont le journaliste Khaled Drareni, qui purge une peine de deux ans de prison ferme pour avoir couvert une marche du hirak en mars dernier.

«La liberté d’expression, qui comprend la liberté des journalistes, qu’ils soient professionnels ou citoyens, d’informer et de proposer une analyse et des commentaires sur les manifestations et sur toute autre forme d’expression de mécontentement à l’égard du gouvernement ou de personnes physiques ou morales liées au gouvernement, est indispensable pour une transition politique pleinement démocratique», rappellent les signataires, qui exigent la libération de tous les détenus et la cessation des poursuites à leur encontre.

Respect des principes démocratiques

Poursuivant, la résolution du Parlement européen invite également les autorités «à mettre fin à toutes les formes d’intimidation, du harcèlement judiciaire, de criminalisation et d’arrestation ou de détention arbitraires à l’encontre des journalistes qui critiquent le gouvernement, des blogueurs, des défenseurs des droits de l’homme, des avocats et des militants».

Citant également les principes universels des droits de l’homme consacrés par la Constitution algérienne et le Pacte international pour les droits civils et politiques (PIDCP), les signataires «invitent instamment les autorités algériennes à garantir l’existence d’un espace de liberté dévolu à la société civile qui permette la tenue d’un authentique dialogue politique et ne criminalise pas les libertés fondamentales».

Ils insistent, dans la foulée, sur le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux consacrés par la Déclaration universelle des droits de l’homme. Poursuivant, la résolution pointe du doigt aussi la série d’articles de lois liberticides adoptés récemment, dont le texte nº20-06 qui criminalise de manière arbitraire la diffusion d’«informations fallacieuses».

Elle cite, notamment, la loi sur les associations ainsi que les articles 75, 79, 95 bis, 98, 100, 144, 144 bis, 144 bis 2, 146 et 196 bis du code pénal, qui ont été utilisés pour poursuivre et condamner des militants politiques, des journalistes et des activistes du hirak.

Ces textes, explique la résolution, doivent être mis en conformité avec le PIDCP. Dans ce sens, le document exige la levée de l’interdiction de l’emblème amazigh, dont le port a conduit à des dizaines d’arrestations et de condamnations en 2019.

S’adressant aux institutions de l’Union européenne (UE), ces parlementaires les invitent à «apporter leur soutien aux groupes de la société civile, aux défenseurs des droits de l’homme, aux journalistes et aux manifestants, y compris en se montrant publiquement plus fermes au sujet du respect des droits de l’homme et de l’Etat de droit en Algérie».

Ils leur demandent aussi de «condamner, sans ambiguïté et de manière publique, les atteintes aux droits de l’homme, en invitant instamment les autorités à remettre en liberté les victimes de détentions arbitraires et à cesser de recourir de manière excessive à la détention provisoire».

Arrêtés en octobre 2019 et remis en liberté provisoire en janvier dernier

Cinq militants de l’association RAJ enfin jugés

C’est un véritable feuilleton pour eux. Cinq militants de l’association RAJ, arrêté le 4 octobre 2019 à l’issue d’une marche du hirak et maintenus en détention pendant plus de trois mois, ont enfin été jugés.

Leur procès a eu lieu jeudi dernier au tribunal de Sidi M’hamed d’Alger, après plus d’une année d’attente. Il s’agit de Hakim Addad, Ould Ouali Nassim, Massinissa Aissous, Djallal Mokrani et Hmimi Bouider.

Le procureur de la République a requis un an de prison ferme et des amendes à leur encontre, selon l’association RAJ, précisant que le verdict devrait être rendu le 3 décembre.

Ce procès, rappelons-le, a été reporté une dizaine de fois, maintenant les concernés dans une interminable liberté provisoire.

Par ailleurs, le juge près le même tribunal a prononcé, jeudi dernier encore, son verdict dans le procès de deux autres ex-détenus d’opinion, en l’occurrence Omar Bouchenane et Kamel Mesrouk, accusé d’«incitation à attroupement» et «atteinte à l’unité nationale».

Ces derniers ont été relaxés. Le parquet avait requis 18 mois de prison ferme à leur encontre. Les deux militants avaient été arrêtés le 5 octobre 2019 et remis en liberté provisoire le 2 janvier dernier.

A la cour d’Alger, le juge a également prononcé son verdict dans le procès en appel d’une vingtaine de manifestants.

Quatre d’entre eux ont condamnés à 3 mois de prison avec sursis. Il s’agit de Djamel Eddine Oulmane, Aït Ouarab Ahcene, Farid Boughida et Abdelghani Ben Ghanem. Les autres accusés ont, quant à eux, bénéficié d’une relaxe. M. M.


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