Le Commandant Azzedine répond au Colonel Hassan



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Dans la livraison d’El Watan du 4 février 2021, et dans le portrait de M. Hamid Tahri consacré au colonel Si Hassan de la Wilaya IV, se sont glissées un certain nombre d’erreurs dans les dates et le déroulement des faits qui m’interpellent, car ils sont relatifs à des événements que j’ai vécus et qui touchent à la Zone autonome d’Alger (ZAA) que je dirigeais durant la période concernée par des passages de l’article. Je vous serai reconnaissant d’apporter ces précisions. 

Je vous en remercie par avance. 

Mon propos, loin de toute forme de polémique, est destiné à rappeler les faits, rien que les faits à mon frère de combat, le colonel Si Hassan, de la Wilaya IV, Wilaya au sein de la quelle j’ai servi en qualité de commandant militaire et chef du prestigieux commando Ali Khodja, avant mon départ pour Tunis et ma désignation comme membre de l’Etat-major général de l’ALN (EMG). La responsabilité de cette structure militaire, créée en janvier 1960, après la réunion des 10 colonels, dite des 100 jours (août à décembre 1959), et une plénière du CNRA, avait été confiée au colonel Houari Boumediène, qui était secondé dans sa mission par les commandants Slimane (Kaïd Ahmed) pour les questions politiques ; Ali Mendjeli, responsable des Renseignements et liaisons, et moi-même comme commandant chargé des questions militaires. 

Mon colonel, vous avez certainement en mémoire de mon retour en Algérie avec un ordre de mission du président du GPRA qui m’enjoignait de vous confirmer, officiellement, en tant que colonel de la Wilaya IV, chose qui fut faite après une réunion avec le conseil de Wilaya auquel avaient assisté notamment les officiers Si Lakhdar Bouregaa et Si Berrouaghia. 

Vous avez aussi en mémoire que Si Moussa et moi, qui étions arrivés les premiers, nous avions été rejoints par le colonel Si Sadek (Dehilès), le commandant Omar Oussedik, les capitaines Ali Lounici et Boualem Oussedik, Mohamed Cherak et Aïtsi. Hormis Si Sadek Dehilès, ancien chef de la Wilaya IV, qui était arrivé par la même filière mais après nous, était resté avec vous, tandis que nous avons rejoint Alger dans le but de restructurer la Zone autonome et particulièrement organiser la lutte contre les commandos déchaînés de l’OAS. A cet effet, vous aviez chargé Si Berrouaghia de nous conduire à Alger et de nous mettre en contact avec les militants de la zone VI pour commencer notre travail dans la capitale.

Dans votre texte, vous affirmez qu’après votre déplacement à Rabat pour y rencontrer Ahmed Ben Bella et Mohamed Khider et la réunion du 20 juillet 1962 à Chlef, et faute de consensus, «la Wilaya IV est restée fidèle à sa neutralité»… Mon colonel, avez-vous oublié que le sang a coulé, que des unités dépendant de votre commandement ont affronté des unités de l’armée des frontières. 

A ce propos, le colonel Mohamed Zerguini, auteur d’un livre qu’il a intitulé Une Vie de Combats et de Lutte, dans son tome 1, paru aux éditions En Nahdha en 2000, fait état de violents combats entre les bataillons de l’armée dirigée par l’EMG et les combattants de la Wilaya IV, qu’il cite nommément, sur les pages allant de 192 à 203. Il signale à cet effet de «très» nombreux morts et blessés. Il ne manque pas d’épiloguer sur ces «faits d’armes», hélas fratricides, et je le cite : «Le combat ne cessa qu’après qu’un accord de cessez-le-feu fut signé entre le colonel Khatib chef de la Wilaya IV et le capitaine Cherif Belgacem, responsable des Services ouest de l’état-major général, en présence de Ben Bella, du colonel Abbes et du capitaine
Bouteflika». 

Il ajoute : «Le calme revenu en ces lieux, Ben Bella et le colonel Khatib se rendirent en hélicoptère sur les lieux d’accrochage des autres axes où avec Chaabani et Zbiri, ils mirent fin à toutes les confrontations». 

Mon colonel, si la Wilaya IV avait observé la «neutralité», d’où viennent les manifestations populaires qui exigeaient «Sebaa sinin barakat» ? Le sang a coulé, mon colonel. Devrions-nous inscrire les victimes de ces affrontements dans la colonne pertes et profit ? 

Mon colonel, après cela, donc des faits qui se sont déroulés après le 3 juillet et les résultats du référendum, vous dites, et je vous cite, que la Wilaya IV «a libéré Alger où les résidus de l’OAS activaient toujours». Mon étonnement est grand : où était la direction de la Zone autonome et tous ses combattants pendant que «la Wilaya IV libérait Alger» ? Vous n’ignorez pas que nous avons opposé à l’OAS une résistance d’un héroïsme rare, malgré les complicités de l’armée, de la police, de la gendarmerie et de toute l’administration colonialiste. Que nos actions ont empêché l’aboutissement du projet des ultras de faire capoter les Accords d’Evian. Jusqu’au 27 juillet, la Wilaya IV en «décousait» encore avec l’armée des frontières. C’est la ZAA, qui a proclamé Alger ville ouverte à tous les Algériens et personne d’autre. 

Quant à la participation de la Wilaya que vous dirigiez aux cérémonies qui s’étaient déroulées à Sidi Fredj, auxquelles j’étais présent aux côtés de Mohand Ou El-Hadj, chef de la Wilaya III, en ma qualité de chef de la ZAA, entrait dans l’organisation protocolaire qui voulait qu’un détachement de chacune des six Wilayas du pays y prenne part. Je me demande bien ce qui restait à libérer à Alger ou ailleurs dans toute l’Algérie, après l’éclatant OUI du peuple algérien au référendum du 1er juillet 1962. 

La Zone autonome d’Alger est une réalité historique. Vouloir taire l’héroïsme de ses combattants, c’est vouloir placer sous le boisseau de la négation le courage et la noblesse de la lutte du peuple d’Alger. Alger s’est libérée. 

Le pouvoir s’est appliqué depuis 1962 à effacer les traces de la Zone autonome d’Alger recomposée et réactivée pour mener le combat contre les ultras regroupés dans l’OAS (Organisation armée secrète). 

Des desperados aux ordres d’officiers séditieux d’une armée devenue putschiste qui croyaient, naïvement, perpétuer l’Algérie française, dans un combat d’arrière-garde, condamné d’avance. Pour des raisons aussi inexplicables qu’incompréhensibles, cette page de l’histoire de la guerre de Libération nationale a été froissée et jetée à la corbeille, par les «fonctionnaires de la vérité», pour reprendre la célèbre formule du président Benyoucef Ben Khedda. 

La meilleure manière d’arracher une page d’un livre d’histoire, c’est de ne pas l’écrire. L’histoire de la résistance héroïque d’Alger et du peuple algérois n’a pas encore été écrite. Nos enfants ne l’apprennent pas dans leurs manuels scolaires. Elle n’existe que dans la mémoire de leurs parents. 

Un souvenir se raconte. L’Histoire s’apprend.

Recevez, mon colonel, mes respectueuses salutations.

 

Le Commandant Azzedine

– Chef du Commando Ali Khodja

– Membre du Conseil de la Wilaya IV

– Membre du CNRA

– Membre de l’état-major général de l’ALN

– Chef de la Zone autonome d’Alger 


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