Les cantines scolaires et la gadoue

Une image, de celles dont on voudrait se passer pour l’éternité : des parents inquiets, et c’est le moins qu’on puisse dire, portent leurs enfants à la force de leurs bras. Moins nombreuses mais tout aussi inquiètes, braves et déterminées, des mamans foncent, les pieds dans l’eau et les fruits de leurs entrailles sur le dos. Cela se passe dans une école à la périphérie d’Alger, dans un espace dont on disait qu’il allait être l’incarnation futuriste de l’Algérie moderne, celle des nouvelles technologies et de l’urbanisme d’avant-garde. Dans la vraie vie, Sidi-Abdallah n’est finalement que ça et n’a que… ça à offrir à la vue : au premier jour de la rentrées scolaire, une école envahie par les flots a suscité les pires angoisses chez les tout nouveaux habitants de cette « ville ». Oui, dans le registre de la peur, il n’y a pas pire que celle qu’on éprouve quand la sécurité de ses enfants est menacée. Et à l’école, bon sang ! Dans un centre urbain censé prolonger la capitale avec ce qui se fait de meilleur, surtout de plus… sûr. C’était un jour de rentrée scolaire et il y a eu une petite ondée qui ne devait pas faire de… vagues. À moins que ce ne soit une inspiration perfidement cynique ou l’inverse, il paraît que dans cette école, la leçon de la rentrée consistait en la « sensibilisation des élèves autour des catastrophes naturelles » ! Prémonitoire, en plus !

Avant ça, une info : de celles qui auraient pu et dû prendre plus de place dans l’actualité. Elle n’est pas spectaculaire parce qu’elle ne relève pas d’un scandale, elle n’est pas politique si on n’est pas convaincu comme certains que tout est… politique et elle ne parle pas de foot, ce qui suffit à la ranger dans les faits de seconde ou de dernière zone : beaucoup de fournisseurs refusent de livrer les cantines scolaires. On n’en connaît pas les proportions avec précision mais ils sont nombreux selon les sources du Soir d’Algérie. La raison est que la subite flambée des prix des produits alimentaires a fait que les commandes passées avec les anciens coûts n’arrangent plus les commerçants qui ne trouvent plus leurs comptes avec les nouvelles données du marché. Tout le monde sait l’importance des cantines scolaires. Tout le monde sait aussi qu’en la matière, c’était déjà loin d’être brillant avant ça. On sait que leur nombre est très maigre par rapport au nombre d’établissements scolaires existants dans le pays, on sait que celles qui existent n’assurent pas toujours des repas à hauteur des besoins des enfants, on sait enfin que la gestion de ces structures n’est pas un exemple de transparence.
Comme image et comme nouvelle, il y a mieux à attendre d’une rentrée scolaire, vraiment.
S. L.